Prédication du dimanche 7 mai 2017 : Jean 10.1-14 - Ecouter la voix du berger (S.Guiton)


Nos vies ressemblent parfois à ces repas de famille où tout le monde parle en même temps, et où l’on ne sait plus où donner de la tête ! Notamment dans la période électorale qui s’achève aujourd’hui, où plus que jamais des voix divergentes se sont élevées et affrontées. 
Au milieu de ce brouhaha, le texte d’aujourd’hui nous invite à faire silence pour écouter la voix de Jésus-Christ. Une voix qui ne ressemble à aucune autre. 

Nous lisons en Jean 10.1-14. 

Lecture

1 « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui n'entre pas dans l'enclos des brebis par la porte mais s'y introduit par un autre endroit est un voleur et un brigand. 2 Mais celui qui entre par la porte est le berger des brebis. 3 Le gardien lui ouvre et les brebis écoutent sa voix; il appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent et il les conduit dehors. 
4 Lorsqu'il les a [toutes] fait sortir, il marche devant elles et les brebis le suivent, parce qu'elles connaissent sa voix. 5 Elles ne suivront pas un étranger, mais elles fuiront au contraire loin de lui, parce qu'elles ne connaissent pas la voix des étrangers.» 6 Jésus leur dit cette parabole, mais ils ne comprirent pas de quoi il leur parlait.
7 Jésus leur dit encore: «En vérité, en vérité, je vous le dis, je suis la porte des brebis. 
8 Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des brigands, mais les brebis ne les ont pas écoutés. 9 C’est moi qui suis la porte. Si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé; il entrera et sortira, et il trouvera de quoi se nourrir. 10 Le voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire; moi, je suis venu afin que les brebis aient la vie et qu'elles l'aient en abondance.
11 Je suis le bon berger. Le bon berger donne sa vie pour ses brebis. 12 Le simple salarié, quant à lui, n'est pas le berger et les brebis ne lui appartiennent pas. Lorsqu'il voit venir le loup, il abandonne les brebis et prend la fuite; alors le loup s'en empare et les disperse. 13 [Le simple salarié s'enfuit] car il travaille pour de l’argent et ne se soucie pas des brebis. 14 Moi, je suis le bon berger. Je connais mes brebis et elles me connaissent, 15 tout comme le Père me connaît et comme je connais le Père. Je donne ma vie pour mes brebis.

Ce texte est l’un des plus connus de la Bible. 
Et l’image du bon berger est l’une des plus utilisées pour parler de Jésus aux enfants 
Au point d’avoir été réduite, peut-être, à un cliché naïf, aux couleurs un peu délavées. On voit un berger à la longue barbe, des moutons bien blancs et bien peignés qui batifolent dans une prairie fleurie. Ils ne font pas jusqu’à faire des «sauts de cabri »,  ce sont des moutons… Mais l’image peut sembler un peu décalée, douce et romantique.. 

Ne nous laissons pas égarer par ces clichés : d’abord, à l’époque, brebis, bergers et bergerie ne font pas rêver : ils font partie de la vie quotidienne.
Et ensuite, le contexte dans lequel Jésus prononce ces paroles est extrêmement tendu.
On est dans un affrontement dont les enjeux sont importants. D’ailleurs, ils conduiront Jésus à la mort. 
Jésus prononce en effet ces paroles devant ce « parti d’opposition » que sont les pharisiens, des juifs très légalistes. Ceux-ci lui reprochent d’avoir guéri un aveugle le jour du sabbat. L’homme aveugle, écoutant la voix de Jésus, lui a fait confiance, et il a été guéri. Mais les religieux, eux, refusent d’écouter. 

Voilà pourquoi Jésus les interpelle en affirmant qu’il est « la porte », « le bon berger »… 
Pour nous, rien de très provocateur. Mais pour les auditeurs de l’époque, si ! Car ils  comprennent tout de suite les allusions directes à l’Ancien Testament que fait Jésus ici. 
Allusion au psaume 23 : « le Seigneur est mon berger, je ne manquerai de rien ».
Allusion aux nombreuses prophéties qui dénoncent « les bergers qui laissent dépérir à l’abandon le troupeau » du « pâturage de Dieu »; des prophéties dans lesquelles Dieu annonce : « voici que j’aurai soin moi-même de mon troupeau »(Ez 34), « J’établirai sur eux des bergers qui les feront paître ; ils n’auront plus peur, ils ne seront plus accablés, plus aucun d’eux ne manquera à l’appel » (Jérémie 23.1-4).

Ses auditeurs comprennent : Jésus est en train de leur dire qu’il est ce berger promis par Dieu, le Messie. Le bon berger, dans le sens : le véritable berger. Celui qui vient réunir le troupeau de Dieu par sa seule voix. 

Pour bien comprendre l’image, il faut savoir qu’à l’époque, les bêtes passent la nuit dans des enclos en pierre, surveillées par des gardiens qui ne sont pas forcément les bergers eux-mêmes, et qui gardent parfois plusieurs troupeaux différents en même temps. Ca explique le verset 3 : le gardien n’ouvre qu’au vrai berger, et c’est en appelant que celui-ci attire à lui les brebis qui sont à lui. Elles le suivent parce qu’elles reconnaissent sa voix. 

La voix du berger a donc un rôle essentiel dans la relation qu’il a avec son troupeau. Voilà pourquoi Jésus la met en avant : 

« Les brebis écoutent sa voix; il appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent et il les conduit dehors. … les brebis le suivent, parce qu'elles connaissent sa voix. 5 Elles ne suivront pas un étranger, mais elles fuiront au contraire loin de lui, parce qu'elles ne connaissent pas la voix des étrangers».

Jésus est celui qui vient faire entendre la voix du véritable berger "à un troupeau désemparé, et que les faux bergers égarent. Ces religieux qui se servent de la foi pour exercer leur pouvoir autoritaire », pour maintenir les autres dans la soumission (Régine Maire, Savourer l’Evangile, p.196). 
Ils sont les « voleurs » et les « mercenaires » de l’histoire.
Et s’ils peuvent se déguiser en berger, ils ne peuvent prendre sa voix.

Seul Jésus, le véritable berger, peut rassembler le troupeau par sa voix inimitable, qui est celle de Dieu lui-même. 
Il est le seul chemin, la seule voix qui conduise vers la vie et le salut. 

« C’est moi qui suis la porte. Si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé; il entrera et sortira, et il trouvera de quoi se nourrir. … moi, je suis venu afin que les brebis aient la vie et qu'elles l'aient en abondance ».

La difficulté, c’est que d’autres voix tentent de la couvrir. A l’époque, celle des chefs religieux.
  Aujourd’hui, les voix sont encore plus nombreuses !
Ne serait-ce que toutes nos voix intérieures.
Voix de nos craintes et de nos angoisses.
De la colère, du doute.
Du passé, de notre éducation ou de nos blessures. « Tu n’y arriveras jamais ». « Tu n’es bon à rien ». « Tu n’as pas ta place ». 
Tant de voix que Satan, l’adversaire venu pour « voler, égorger et détruire » sait aussi brouiller et retourner pour nous séparer de nous-mêmes, des autres et de Dieu - comme le loup isole la brebis avant de l’attaquer. 

Mais si nous cherchons à l’entendre, dans la Bible, dans la prière, la voix du Bon Berger nous guidera, inimitable, vers la vie éternelle. 

Elle est inimitable, parce qu’elle est une voix d’amour. Pleine de bonté, de souci pour chacun. Le Fils de Dieu connait ses brebis « par leur nom ». Il en prend soin, individuellement. Il veut nouer avec chacun d’entre nous une relation particulière.
Son attachement est tel qu’il donne sa vie pour ses brebis. Ce qui lui donne la légitimité suprême sur le troupeau. 
Sa voix est inimitable aussi, parce qu’elle conduit vers la vie.  
Ce qui la distingue des « voix » pourtant séduisantes au premier abord qui peuvent nous conduire vers la dépendance, voire même l’esclavage. On pense aux addictions. 
Toutes les voix qui nous conduisent aussi à la culpabilité, le repli sur soi, la honte. 
Il n’y a rien de tout ça dans la voix du berger : il donne sa vie pour que ses brebis vivent, libres. Son amour inconditionnel épanouit ceux qui acceptent de le recevoir. 

Voilà un bon critère pour savoir si c’est bien la voix de Dieu que j’écoute : me fait-elle avancer vers plus de vie, plus d’amour ? M’amène-t’elle à aller vers les autres pour les aimer aussi? Sur ce chemin, l’herbe est-elle nourrissante ? La paix, la joie, l’amour, ….qui sont le fruit de l’Esprit, poussent-ils ? 
Sa voix est inimitable enfin, parce que c’est une voix qui rassemble. Elle donne l’unité, avec Dieu et avec les autres : « Je connais mes brebis et elles me connaissent, tout comme le Père me connaît et comme je connais le Père».
Elle nous appelle ensemble, et chacun a sa place, parce que le berger l’y a appelé. Chacun peut y avancer à son rythme, chacun y est reconnu pour lui-même.

Le croyons-nous ? Comme des brebis sensibles et fragiles, nous sommes bien vite troublés, désorientés. Il me semble que notre estime de nous-mêmes est souvent bien faible, ce qui nous rends vulnérables, notamment au doute. Ainsi, combien d’entre nous se demandent où est leur place, et même s’ils ont une place dans l’Eglise ? Dans l’amour de Dieu ? 

Jésus dit ici qu’il nous assure lui-même cette place, parce que c’est lui qui nous a choisis. Comme le dit Jean Vanier, on n’est pas dans l’Eglise « parce qu’on s’aime ni même parce qu’on a un projet commun mais parce qu’on a été appelés ensemble par Dieu » (La communauté, lieu du pardon et de la fête, p.50). 
« Il appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent». 

Quand nous avons posé la question, l’an dernier : « quels sont vos dons ? », plusieurs parmi nous se sont sentis gênés… que cette affirmation nous aide à dépasser cela, et à oser prendre notre place dans la communauté : le coeur de Dieu est particulièrement proche des brebis les plus fragiles ! 
Finalement, Jésus donne ici une belle illustration de ce qu’est la foi : le suivre en lui faisant confiance sans voir. Juste en écoutant sa voix, ses promesses. L’affirmation de son amour pour nous. 

L’homme aveugle guéri juste avant a cru, lui aussi : pour lui rendre la vue, Jésus lui a mis de la boue sur les yeux : avouez que pour y voir mieux, c’est étonnant, comme technique ! Et en plus, Jésus l’envoie ailleurs, alors que le pauvre n’y voit toujours rien : « Va te laver à la piscine de Siloé ». « L’aveugle y alla, il se lava et, à son retour, il voyait». 
Mais il lui a fallu marcher par la foi. Qu’est-ce qui l’a conduit et sauvé ? Il a écouté la voix de Jésus,  alors que les Pharisiens sont restés sourds. 
Cette voix qui dira ensuite à Marthe : « « Je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? » 

Cette voix qui nous appelle, chacun ici, ce matin, à sortir de notre enclos pour avancer vers Dieu. 
« Il appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent et il les conduit dehors ».
Sortir de l’enclos ? Oui ! J’ai longtemps eu en tête l’idée que le berger appelait les brebis dans la bergerie. Mais Jésus dit au contraire qu’il les fait sortir
Comme Dieu a appelé le peuple d’Israël hors d’Egypte pour le conduire vers la Terre Promise, Jésus appelle ceux qui l’écoutent à sortir de l’enclos pour se laisser conduire, libres, dans les pâturages - c’est-à-dire là où ils auront de quoi vivre, manger et s’épanouir. La vie en abondance. 
Jésus appelle, à nous de choisir : l’écouter, le suivre - et vivre. Ou rester dans l’enclos - au risque de mourir, puisque la vie est dehors.  

Entrer dans la vie de Dieu, dans le peuple/troupeau de Dieu. Et suivre Jésus au-delà de la mort, dans la résurrection pour la vie éternelle - ou rester sourd, comme les pharisiens. 
Finissons donc en laissant résonner quelques questions personnelles : 
- Quelle est ma réponse à l’appel de Jésus ? 
- Suis-je encore dans un enclos, ou bien dehors, avec le berger ? 
- Tous ceux qui l’écoutent ont une place dans le troupeau : ai-je trouvé la mienne ? Ai je demandé à Christ de m’y conduire ? 

[Temps de silence]


Prière : 
Seigneur, 
je te prie ce matin pour tous ceux qui écoutent ta voix et se lèvent pour te suivre : encourage-les, rassure-les, fortifie-les.
Je te prie pour tous ceux qui entendent ta voix mais qui sont retenus d’avancer : que ton Esprit d’amour les apaise et leur ouvre le chemin vers toi.
Je te prie pour tous ceux qui ne trouvent pas leur place dans ton troupeau, ceux qui ne sentent pas dignes, ceux qui ne sentent pas bien. Tu les connais par leur nom, conduis-les, bénis-les. 
Rends nous attentifs les uns aux autres, afin que personne ne reste sur le bord du chemin. 
Donne-nous de l’amour pour ceux que nous avons du mal à aimer, car eux aussi, tu les as appelés.
Merci de nous rassembler dans ton amour. 

Amen 




Pour les groupes de discussion 


Pour aller plus loin 

a. Les bergers infidèles
Textes complémentaires : Jérémie 23.1-4, Ezéchiel 34.1-6 et 11-16

1. Quels sont les reproches que Dieu fait aux « bergers » d’Israël ? Quelle est sa réponse ? 
2. Que nous apprend ce passage sur le rapport du Dieu « berger » avec son peuple ? 

b. Le berger et son troupeau 
Relisez Jean 10.1-11

3. Listez tout ce que le berger fait pour son troupeau. 
4. Qui sont les « brebis » de Jésus ? (Lisez Jean 10 versets 3 et 14-16)
5. Que nous apprend ce passage sur le caractère et la mission de Jésus ?

c. Connaître et être connu 

6. Pourquoi Jésus dit-il : « je les connais » ? Que signifie « être connu par Jésus » ? (Lisez Jean 10.14-15)
Et que signifie « connaitre Jésus » ?

Questions d'application

Ecouter la voix du berger 

Quels sont les différentes moyens, pour nous, d’écouter la voix de Jésus aujourd’hui ? 
Est-ce que c’est difficile pour vous de l’écouter ? 
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans ce domaine, et comment pourriez-vous les surmonter ? Vous pouvez partager sur ce sujet avec le reste du groupe. 

Trouver ma place dans le troupeau 

Tous ceux qui l’écoutent ont une place dans le troupeau : avez-vous trouvé la vôtre ? Comment pourriez-vous avancer dans ce domaine ? 



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