Prédication du 5 avril 2020 - Actes 5.12-16 - Des « signes » et des « prodiges » dans l’Eglise aujourd’hui ? (S. Guiton)
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Dieu guérit-il encore aujourd’hui ?
Cette question que beaucoup d’entre nous se posent, en cette période de pandémie, le passage biblique d’aujourd’hui nous la pose aussi.
C’est un passage du livre des Actes, écrit par Luc, et qui nous amène au premier siècle après Jésus-Christ, juste après sa mort, dans une période assez extraordinaire. L’Église naît à ce moment-là, avec le don du St Esprit accordé à tous les croyants le jour de Pentecôte. Suite à la prédication puissante des apôtres remplis de l’Esprit de Jésus, de nombreuses personnes décident de suivre le Christ. Malgré les oppositions diverses, le groupe grandit vite, il se réunit au cœur de Jérusalem, dans le Temple même, au milieu des juifs, et mène une vie communautaire intense, enthousiasmante ! Et Dieu se manifeste parfois de façon spectaculaire au milieu d’eux.
La semaine dernière, Fréderic Separi a raconté par exemple comment les apôtres guérissaient une personne atteinte d’un handicap moteur.
Nous lisons la suite en Actes 5.12-16.
12 De nombreux signes extraordinaires et prodiges étaient accomplis par les apôtres parmi le peuple. Les croyants se tenaient tous ensemble dans la galerie à colonnes de Salomon.
13 Personne d'autre n'osait les approcher de près, et pourtant le peuple les estimait beaucoup.
14 Une foule de plus en plus nombreuse d'hommes et de femmes croyaient au Seigneur.
15 Et l'on se mit à amener les malades dans les rues : on les déposait sur des civières ou des brancards afin qu'au moment où Pierre passerait, son ombre au moins recouvre l'un ou l'autre d'entre eux.
16 Une multitude de gens accouraient aussi des localités voisines de Jérusalem ; ils amenaient des malades et des personnes tourmentées par des esprits impurs, et tous étaient guéris.
Je l’avoue, voilà un passage qui ne me laisse pas indifférent. Il suscite en moi de l’enthousiasme… et aussi un peu de mélancolie : quel contraste entre cette Église du début… et celle que nous connaissons !
Ces quelques versets sont aussi un défi pour ma foi en ces temps de pandémie : « tous étaient guéris » !
Je pense au bilan des décès présenté chaque jour par les autorités.
« Tous étaient guéris »… Alors… Est-ce vraiment possible ?
D’un côté, ce passage semble nous parler d’un autre monde… et pourtant, c’est bien des faits que Luc, le médecin rigoureux, cherche à rapporter ici, avec enthousiasme !
On le sent émerveillé par ce que Dieu a fait. C’est comme s’il n’y avait pas de mots assez forts pour dire à quel point la période qu’il décrit est bénie : de nombreux signes, une foule de gens de plus en plus nombreuse qui croit, une multitude de gens qui accourt de toute la région pour apporter ses malades… et tous sont guéris.
Ce qui suscite l’admiration de Luc, c’est la façon dont Dieu se manifeste :
« De nombreux signes extraordinaires et prodiges étaient accomplis par les apôtres parmi le peuple » (v.12).
Que peuvent bien être ces « signes extraordinaires et ces prodiges » ?
Dans le Nouveau Testament, le plus souvent, les « signes » désignent des actions, des événements qui, manifestement, ne peuvent venir des hommes, et qui confirment que Dieu est en train d’agir. On pense à tous les miracles de Jésus, aux guérisons donc, comme ici.
Mais il y a aussi l’autorité avec laquelle les Apôtres prennent la parole à cette période, qui est un des signes, et non des moindres – voir ces pécheurs de Galilée sans instruction qui, peu de temps avant, se cachaient, terrorisés, et qui tout à coup tiennent tête aux érudits de Jérusalem avec une autorité et une sagesse évidentes… cela tient aussi du miracle.
Le mot « prodige », dont le sens est proche, insiste lui sur la réaction attendue : les prédications, les guérisons sont là aussi pour interpeler les gens et appeler une prise de position de leur part.
La façon dont l’Église vit sa foi favorise cette interpellation : Luc dit que l’Église a pris l’habitude de se réunir dans la galerie de Salomon, sur la place du Temple, au cœur de Jérusalem – elle a donc pignon sur rue. Tout le monde voit ce qui s’y passe, et peut prendre position. Luc décrit trois types de positions : certains sont attirés, et croient ; d’autres respectent mais restent à distance, avec un peu de crainte, peut-être de scepticisme ; et puis il y a ceux qui sont farouchement contre et vont s’opposer, attaquer.
En tout cas, l’Église alors ne laisse personne indifférent. Selon nos critères contemporains, son succès semble même total : ses membres sont unis ; sa réputation grandit, elle a de l’impact sur la société, elle attire de plus en plus de gens….
Et surtout, donc Dieu agit au milieu d’elle avec puissance :
Une multitude de gens accouraient aussi des localités voisines de Jérusalem ; ils amenaient des malades et des personnes tourmentées par des esprits impurs, et tous étaient guéris.
Comment ne pas se sentir proches de toutes ces familles qui se mobilisent pour leurs malades ? Il n’y a pas d’ambulances à l’époque, il faut les porter à bout de bras...
L’Église leur apporte de l’espoir.
Enfin, une porte s’ouvre, une espérance….
Oui, très honnêtement, ce passage me laisse perplexe… La vie de nos communautés aujourd’hui ressemble-t’elle à cela ?
Des communautés unies, respectées même des non croyants, des communautés qui manifestent la présence de Dieu au milieu de la cité, qui interpellent le monde, qui suscitent une véritable espérance, et dans lesquelles Dieu se manifeste avec des signes et des prodiges ?...
Au premier abord, on dirait que dans la France du XXIe siècle, l’Eglise suscite plus d’indifférence que d’enthousiasme…
Et que dire de sa réputation, quand on entend dire partout que c’est à cause d’une Église Evangélique , à Mulhouse, que la « bombe atomique » du coronavirus a explosé en France… difficile à entendre, n’est-ce pas ?
Passer d’une Église enthousiasmante par laquelle, « tous étaient guéris » … à une Église discrète, et qui apporterait même la maladie … le contraste est difficile à accepter !
Mais, en comparant notre situation à celle des Actes, il ne s’agit pas de se décourager, ou de se lamenter sur un âge d’or disparu, ni même de chercher quel secret mystérieux nous permettrait de retrouver la flamme des débuts…
Il me semble que ces versets nous interpellent d’une façon beaucoup plus simple, en nous ramenant à l’essentiel : la présence du Ressuscité dans ce monde, et au milieu de son Eglise.
Voilà l’essentiel devant lequel Luc nous place : le Christ est vivant et agissant.
C’est lui la véritable source de fécondité de l’Église, hier comme aujourd’hui.
Et Sa Parole, ici, nous lance plusieurs défis, que nous devons relever si nous voulons rester vivants, et manifester la vie du Christ nous aussi.
J’en ai retenu trois.
Premièrement, un défi d’unité : « Les croyants se tenaient tous ensemble.. », dit Luc. C’est important. Au chapitre précédent, Luc a même fait un lien entre l’unité profonde de ces chrétiens et l’action puissante de Dieu parmi eux :
cf 4.32 La multitude des croyants était parfaitement unie, de cœur et d'âme. Aucun d'eux ne disait que ses biens étaient à lui seul, mais ils mettaient en commun tout ce qu'ils avaient.
33 C'est avec une grande puissance que les apôtres rendaient témoignage à la résurrection du Seigneur Jésus et Dieu leur accordait à tous d'abondantes bénédictions.
Cela me touche : il semble que le désir de vivre la foi ensemble soit déterminant pour que Dieu puisse bénir son Église.
Chercher l’unité entre nous, au-delà même des murs de nos traditions, et au prix de concessions, au prix de l’humilité et du pardon, c’est une façon d’honorer Dieu et de permettre au Saint Esprit d’agir librement dans nos vies, dans nos communautés.
Et si nous mettions notre énergie dans cette rechercher d’unité pour la gloire de Dieu au lieu de courir chacun après sa propre gloire ?
Voilà un premier défi, et non des moindres.
Deuxièmement, il me semble que ce passage nous invite à revoir notre compréhension de la réussite.
Au lieu de nous lamenter parce que nous ne réussissons pas aussi bien que l’Église d’Actes 5 semble le faire, élargissons notre regard : il se trouve d’abord que cette communauté rayonnante… va être dissoute peu de temps après, à cause d’une violente persécution qui va disperser les chrétiens un peu partout. Cette épreuve va presque anéantir la communauté de Jérusalem … mais elle va permettre à l’Église de Jésus-Christ de se répandre dans tout le bassin méditerranéen, elle va permettre aux chrétiens d’accomplir la volonté de Dieu : « vous serez mes témoins jusqu’aux extrémités de la terre ».
Ainsi, la réussite pour Dieu, c’est d’abord quand sa volonté est accomplie, et que les gens sont transformés en profondeur par son amour et par sa grâce.
Bien sûr, on peut parler de « réussite » quand quelqu’un guérit de façon incroyable alors que l’on a prié pour lui, quand des personnes viennent à Christ et rejoignent une assemblée, que cette assemblée grandit et rayonne…
Mais réussir selon Dieu, c’est aussi, parfois, simplement garder l’espérance malgré la maladie, accepter de tout perdre par fidélité à l’Evangile, mourir sur une croix par amour…
Et si l’échec apparent de nos efforts d’Eglises était une occasion pour remettre en question nos modes de fonctionnement, et chercher ce que le Ressuscité nous appelle vraiment à vivre ? Voilà encore un beau défi pour nous !
Et si nous prenions du temps pour y réfléchir, dans la prière, en ce temps de Pâques ?
Pour finir, ce passage nous lance à tous un défi de foi : oser croire que Jésus.. est bien vivant aujourd’hui. Que l’événement de Pâques nous concerne directement et concrètement.
Oser croire que le Christ Ressuscité continue à accomplir des signes et des prodiges au cœur de nos vies, avec puissance et avec discrétion…
Oser croire qu’il est souverain sur le coronavirus, qu’il est présent dans le secret des chambres d’hôpital.
Cette semaine encore, plusieurs d’entre nous ont pu être témoins de la façon étonnante dont Dieu a agi pour eux– autour de la maladie, autour d’une opération, par des rencontres providentielles, des paroles inspirées… on pourrait raconter de belles histories vraies là dessus (peut-être qu’on entendre ces témoignages plus tard)
Oui, Dieu est fidèle, et son amour est actif – son amour est prodigieux !
Alors…. si nous décidions de quitter le cercle des sceptiques, de ceux qui se tiennent un peu à distance, et que nous osions un pas de foi, même timide, même hésitant ?
Et si nous nous laissions inspirer par la foi simple de cette « multitude de gens » qui accouraient … de toute la région pour « amener » leurs malades aux apôtres ?
Pour certains, ça partait même en superstition (ombre de Pierre)… mais Dieu montre ici de la bienveillance avec leurs maladresses, et il guérit quand même !
Il fera la même chose avec nous. Alors venons vers Jésus, et portons ceux qui nous entourent dans la prière jusqu’à lui, avec cette même foi, cette même espérance que oui, il peut guérir, il veut guérir, qu’il est une source de vie pour ceux qui lui font confiance.
Soyons en assurés, le Christ ressuscité sera là pour nous. Il saura guérir nos cœurs durcis, parler à notre intelligence, et bénir nos corps.
A lui seul soit la gloire, aux siècles des siècles.
Amen
Sylvain Guiton
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