Prédication du 17 janvier 2021 - Membre de l’Eglise, qu’en dit la Bible ? Ephésiens 2.11-22
Quand on fréquente une Eglise comme celle-ci, on entend régulièrement des messages adressés spécifiquement aux « membres ». Souvent des annonces concernant des réunions avec des décisions à prendre.
Qu’est-ce
donc qu’être membre d’une Eglise, précisément ?
Qui est concerné ? Quelles sont les conditions pour l’être, et quel
intérêt y a-t-il à l’être ?
Si on faisait un micro-trottoir à la sortie du
culte, on obtiendrait sans doute des réponses très diverses : certains
parleraient de l’association cultuelle à laquelle il s’agit d’adhérer, pour
pouvoir voter et décider des orientations de l’Eglise, des grandes dépenses,
choisir le pasteur…
D’autres
insisteront sur l’engagement devant Dieu, ou sur le « témoignage » à
donner pour le devenir…
Autant
de réponses différentes, en raison notamment du mélange des genres imposé
par la loi française (que je ne remets pas en cause, étant un fervent
partisan de la séparation de l’Eglise et de l’Etat) :
Oui,
dans une Eglise, le terme « membre » désigne à la fois un statut
administratif – l’adhésion à l’association loi 1905 (dont le fonctionnement
est défini par la loi française) et un statut spirituel, qui lui est défini
par la Parole de Dieu.
Or
c’est cette Parole qui fait autorité par-dessus tout, pour nous. Comment
peut-elle nous aider à habiter le cadre légal de l’association 1905 avec l’état
d’esprit de véritables disciples du Christ ?
Je
vous invite à aborder cela en méditant un passage de la lettre de Paul aux
Ephésiens.
Au
début de l’Eglise, la question de qui était légitime pour être membre des
Eglises s’est posée, dans la douleur – les premiers chrétiens qui étaient
surtout des juifs convertis se pensaient plus légitimes que les nombreux païens
arrivés ensuite, et cela créait des tensions entre communautés, et la nécessité
d’une réponse à la question : qu’est-ce que Dieu est en train de faire,
là, en rassemblant des gens aussi divers ? Qu’est-ce qui légitime
l’appartenance de chacun à tout ça ?
Paul
va alors clarifier les choses, en s’adressant aux chrétiens d’origine païenne.
11 Rappelez-vous donc ce
que vous étiez autrefois ! Vous n'êtes pas Juifs de naissance ; les Juifs vous
traitent d'incirconcis alors qu'ils s'appellent circoncis en raison d'une
opération pratiquée dans leur chair.
12 Eh bien vous étiez, à
ce moment-là, sans Christ ; vous étiez étrangers, vous n'apparteniez pas au
peuple de Dieu ; vous étiez exclus des alliances fondées sur la promesse divine
; vous viviez dans le monde, sans espérance et sans Dieu.
13 Mais maintenant, par
l'union avec Jésus Christ, vous qui étiez alors loin, vous avez été rapprochés
par le Christ qui a versé son sang.
14 Oui, c'est lui qui
est notre paix, lui qui a fait de ceux qui sont Juifs et de ceux qui ne le sont
pas un seul peuple. En donnant son corps, il a abattu le mur qui les séparait
et qui en faisait des ennemis.
15 Il a annulé la Loi
avec ses commandements et ses règlements, pour former avec les uns et les
autres, un seul peuple nouveau dans l'union avec lui ; c'est ainsi qu'il a
établi la paix.
16 Par sa mort sur la
croix, le Christ les a tous réunis en un seul corps et il les a réconciliés
avec Dieu ; par la croix, il a détruit la haine.
17 Le Christ est venu annoncer
la bonne nouvelle de la paix, la paix pour vous qui étiez loin et la paix pour
ceux qui étaient proches.
18 C'est en effet par le
Christ que nous tous, ceux qui sont Juifs et ceux qui ne le sont pas, nous
avons libre accès auprès de Dieu, le Père, grâce au même Esprit saint.
19 Par conséquent, vous
qui n'êtes pas Juifs, vous n'êtes plus des étrangers, des immigrés ; mais vous
êtes maintenant citoyens à part entière avec ceux qui appartiennent à Dieu, vous
appartenez à la famille de Dieu, à sa maison.
20 Vous êtes intégrés
dans la construction dont les fondations sont les apôtres et les prophètes, et
dont la pierre d'angle est Jésus Christ lui-même.
21 C'est lui qui assure
la solidité de toute la construction et qui la fait s'élever pour former un
temple saint pour le Seigneur.
22 Dans l'union avec
lui, vous faites partie vous aussi de la construction pour devenir avec tous
les autres la demeure que Dieu habite par son Esprit.
Être
membre, c’est entrer dans un projet qui nous précède et nous dépasse
Ici
Paul remet l’Eglise au milieu du village : l’Eglise, dit-il, est
bien plus que ce qu’on peut voir quand on rentre dans un lieu de culte. Des
gens se rassemblent dans une salle pour chanter des cantiques à Dieu, méditer
la Bible, échanger des nouvelles… On pourrait ajouter que cela impose une
organisation, des décisions, une gestion financière… mais Paul souligne surtout
la réalité spirituelle et le projet divin qui se trouvent derrière.
Un
projet de Dieu : réunir en un seul peuple des gens de toutes les origines
autour du Christ, par ce que le Christ a fait. Rassembler, réconcilier ces
personnes non seulement entre elles mais avec lui-même :
« Former avec les uns et
les autres, un seul peuple nouveau dans l'union avec lui ».
« Par sa mort sur la
croix, le Christ les a tous réunis en un seul corps et il les a réconciliés
avec Dieu ; par la croix, il a détruit la haine ».
L’Eglise est une œuvre de réconciliation des
hommes entre eux et avec Dieu, une œuvre dont le fondement est le sacrifice de
Jésus sur la croix, qui permet le pardon et la paix. Cette œuvre nous précède et nous dépasse, car elle est à la fois pour
les chrétiens et pour le monde : Christ en effet est venu
« annoncer la « bonne nouvelle de la paix », l’Evangile, et il
charge son Eglise de l’annoncer maintenant.
Être
membre de l’Eglise signifie donc d’entrer dans ce projet-là, et d’y participer
avec tout ce que l’on est. Il est fondamental de ne jamais
perdre cela de vue, même si ça peut paraître assez loin de nos petites
réalités.
Être
membre, une appartenance
Parler de projet, cela laisse entendre qu’il y a des choses à faire pour réaliser ce projet, et c’est vrai. Mais quand Paul parle du statut de membre, ici, c’est d’abord pour insister sur une appartenance, à travers plusieurs images différentes qui s’entremêlent (ce qui rend le texte pas évident !) : on est membre de l’Eglise comme on est membre d’une famille ou citoyen d’un pays.
Membre
de la maison de Dieu
19 …vous appartenez à la
famille de Dieu, à sa maison.
20 Vous êtes intégrés
dans la construction dont les fondations sont les apôtres et les prophètes, et
dont la pierre d'angle est Jésus Christ lui-même.
21 C'est lui qui assure
la solidité de toute la construction et qui la fait s'élever pour former un
temple saint pour le Seigneur.
22 Dans l'union avec
lui, vous faites partie vous aussi de la construction pour devenir avec tous
les autres la demeure que Dieu habite par son Esprit.
L’image
de la maison, ici, a deux sens : la maison de Dieu, c’est sa famille,
son peuple. La foi en Jésus fait de nous des enfants de Dieu, par adoption.
En
même temps, Paul compare aussi l’Eglise au Temple de Jérusalem, la
« maison de Dieu », où Dieu habitait : par son Esprit, Dieu
habite maintenant dans chaque chrétien. Est membre de la maison celui qui a
reçu cet Esprit lors de sa conversion.
Citoyen
du Royaume de Dieu
Paul
croise cette métaphore de la maison avec une autre : celle de la
citoyenneté.
Avant Jésus, dit Paul aux versets 11-12, nous les non-juifs étions exclus des promesses de Dieu, nous étions « étrangers, sans Dieu, sans espérance ». Mais Christ a obtenu pour tous ceux qui croient en lui « la citoyenneté du royaume des cieux ». : « vous êtes citoyens à part entière ». De quoi enlever tout complexe d’infériorité aux premiers chrétiens qui n’étaient pas d’origine juive, malgré ce que ces derniers pouvaient leur dire.
C’est aussi lors de sa conversion qu’on reçoit cette citoyenneté, mais encore faut-il ensuite demander son passeport… celui-ci est donné par l’Eglise locale, qui est un peu comme une ambassade du Royaume de Dieu dans ce monde. Le fait de devenir membre reconnu d’une Eglise locale confirme formellement notre statut de citoyen du Royaume des cieux.
Dans les pays où les chrétiens sont persécutés, la nécessité de savoir qui est dedans et qui est dehors s’impose… elle est pertinente aussi ici, où on souffre plutôt d’individualisme ; mais un chrétien sans Eglise locale est un expatrié isolé, fragilisé… et ce n’est pas bon. Comment entrer dans cette œuvre de réconciliation... si l'on reste à part ?
Être
membre, une faveur accordée par Dieu
Beaucoup
expriment leur crainte qu’en devenant membre, on leur demande de faire plus de
choses dans l’Eglise… Il y a là un contresens, je crois.
Devenir
membre, c’est témoigner publiquement de notre foi en Christ, de notre
appartenance à sa famille, à son peuple, de notre adhésion profonde à son
projet, et de notre désir de le vivre là où nous sommes.
Voilà
pourquoi dans les Eglises Libres, nous demandons à ceux qui désirent être membre de
témoigner publiquement de leur foi personnelle, de leur adhésion à la
confession de foi de notre Union.
Donc
aucune idée de mérite là-dedans : être membre de l’Eglise est une
faveur, une grâce que Dieu nous accorde, au prix de la vie de son Fils,
comme Paul le souligne ici : « C’est lui qui est notre
paix » ; « C’est en lui… », c’est-à-dire grâce à lui et
par notre foi en lui, que nous devenons membres de la famille, citoyens de
son peuple…
Christ
est notre seule recommandation pour pouvoir devenir membre de sa maison !
Membre
de l’Eglise dont Jésus est le seul chef
Cela implique aussi de reconnaitre Christ comme seul chef de l’Eglise – et donc de cette communauté locale – à la fois la « pierre de l’angle », celle qui tient tout ensemble, et le bâtisseur de l’édifice.
La
structure associative pourrait laisser croire qu’une Eglise est d’abord une démocratie,
avec un focus sur le pouvoir du « peuple » et le statut de
« membre » comme décideur par son droit de vote.
Mais en réalité l’Eglise n’est pas une démocratie, et le focus y est mis sur l’autorité du Seigneur sur chacun des membres de son Eglise… Et même si ceux-ci votent et qu’ultimement, ce sont les décisions en AG qui comptent, chacun doit bien être conscient que son vote n’est pas un « pouvoir », mais une faveur et un service – des autres et du Seigneur. Nos idées, propositions, opinions, positions… doivent d’abord être conformes à Sa Parole et soumises à l’éclairage de son Saint Esprit (ce qui est un exercice communautaire, jamais individuel) comme notre règlement intérieur le dit très bien :
« L’EEL
de Lyon se dirige elle-même à la lumière du St Esprit et dans un esprit de
fidélité à son chef unique : Jésus-Christ » (article 4).
Etre
membre, un état d’esprit
L’humilité et
la reconnaissance d’abord : « Rappelez-vous
(…) ce que vous étiez autrefois ! ».
Nous ne
méritions rien, nous ne devrions même pas avoir le droit d’être là, de
participer à la vie du peuple de Dieu … merci Seigneur d’être venu nous
chercher et de nous avoir accueillis dans ton peuple. Garde-nous tout petits
devant toi et devant les autres.
Ensuite,
le désir sincère de changer, d’être « édifié » et d’édifier »,
pour reprendre l’image de Paul :
« 20 Vous êtes intégrés
dans la construction dont les fondations sont les apôtres et les prophètes, et
dont la pierre d'angle est Jésus Christ lui-même.
22 Dans l'union avec
lui, vous faites partie vous aussi de la construction pour devenir avec tous
les autres la demeure que Dieu habite par son Esprit ».
Désir de
participer à la construction de l’édifice, de contribuer à notre petit
niveau à la croissance des autres, et d’être soi même transformé par le
Seigneur, en se nourrissant de la Parole de Dieu transmise par les
apôtres…
Enfin,
le désir de poursuivre dans l’Eglise locale non pas nos idées, nos objectifs,
nos conceptions des choses, mais le projet de Dieu.
Et
notamment de travailler à ce projet de réconciliation, de paix dans l’Eglise
et hors de l’Eglise, par l’annonce de l’Evangile. S’engager à participer au
service de l’Eglise, au partage (de la cène, des fardeaux), à la vie
communautaire…. Voilà ce qui permet de grandir, d’être transformé, édifié…
Oser
s’engager !
Au
final, on comprend que ce n’est pas pour rien que Paul, donnant à Timothée les
critères de choix pour les responsables d’Eglise, mettra surtout en avant la
maturité spirituelle qui se manifeste par une réelle humilité, un esprit de
service, une foi qui agit concrètement et qui est partagée, témoignée…
une capacité à encourager, aider les autres à grandir…
Ne
pas se sentir petit devant une telle responsabilité serait suspect… mais
oser accepter par la foi l’appel que Christ nous adresse à manifester
humblement et joyeusement notre appartenance à son peuple, par la foi en lui,
en nous appuyant entièrement sur lui… voilà le chemin qu’il nous demande de
suivre !
Alors
osons croire à nouveau à ce beau projet qu’est l’Eglise, et osons-nous y
engager humblement, simplement, pour une seule raison : parce que Dieu
nous y autorise et nous y invite, pour lui et par lui.
Osons
nous engager par reconnaissance envers lui, pour lui rendre gloire et le
servir avec tout ce que nous sommes, car nous vivons par lui, qui seul est
digne d’être adoré, obéi, servi.
A
lui soit la gloire, aux siècles des siècles !
Amen
Questions :
Que
signifie pour moi, concrètement, être membre de l’Eglise ?
Mon
état d’esprit, ma vision… sont-ils conformes à ce que Paul enseigne ici ?
Si
je n’ai pas encore demandé à être membre de l’Eglise locale que je fréquente…
qu’est-ce qui me retient ? Comment puis-je avancer ?
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