Prédication du 1er novembre 2020 - Matthieu 5.1-12 - En marche vers le bonheur !

 Prédication du 1er novembre 2020

Matthieu 5.1-12

En marche vers le bonheur !

 

 

Dimanche après dimanche, des textes bibliques sont proposés à la fois aux Églises protestantes et catholiques, pour une méditation commune de la Parole de Dieu. 

Et en ce dimanche de la Toussaint assombri par un nouvel attentat contre des chrétiens, en plus du contexte sanitaire et économique… c’est un passage particulièrement de circonstances qui nous proposé : les Béatitudes rapportées en Matthieu 5. 

 

Des paroles lumineuses, comme une fenêtre ouverte sur un ciel vaste et pur, une fenêtre ouverte par Dieu lui-même dans le mur de nos enfermements, les murs dressés autour de nous par la violence des hommes et la virulence d’un virus…

 

Alors asseyons-nous aux pieds de Jésus, avec les disciples, et mettons-nous à son écoute ensemble. 

 

Matthieu 5. 1-12

 

1 Quand Jésus vit les foules, il monta sur une montagne et s'assit. Ses disciples vinrent auprès de lui, 2 il prit la parole et leur donna cet enseignement :

3  « Heureux ceux qui sont humbles de cœur,

car le royaume des cieux est à eux !

4 Heureux ceux qui pleurent,

car ils seront consolés !

5 Heureux ceux qui sont doux,

car ils recevront la terre en héritage !

6 Heureux ceux qui ont faim et soif d'un monde juste,

car ils seront comblés !

7 Heureux ceux qui sont pleins de bonté pour les autres,

car on sera plein de bonté pour eux !

8 Heureux ceux qui ont le cœur pur,

car ils verront Dieu !

9 Heureux les artisans de paix,

car ils seront appelés enfants de Dieu !

10 Heureux ceux qu'on persécute à cause de leur combat pour la justice,

car le royaume des cieux est à eux !

11 Heureux êtes-vous quand on vous insulte, quand on vous persécute et quand on dit faussement toute sorte de mal contre vous à cause de moi. 

12 Réjouissez-vous, criez votre joie, car une grande récompense vous attend dans les cieux. C'est ainsi, en effet, qu'on a persécuté les prophètes qui vous ont précédés. »

 

 

« Jésus monta sur une montagne ». Dans la Bible, la montagne est le lieu des grandes révélations. Ce que va dire Jésus est donc particulièrement important. Mais pour le dire, il s’assoit, pour plus de proximité avec ses disciples. Il ne va pas leur parler de  loi religieuse, mais du bonheur

 

Les Béatitudes, des jalons sur la route du bonheur

 

« Heureux… ! ». Jésus ici redit la volonté de Dieu, exprimée dans l’Ancien Testament, de nous conduire au bonheur

Pour atteindre ce bonheur, le chemin qu’il indique est complétement à contre-courant : heureux ceux qui sont humbles, ceux qui pleurent… et même ceux qu’on persécute ! Bien différent des béatitudes du monde : Heureux les riches, les dominants, les bien portants, ceux qui savent tirer leur épingle du jeu sur le dos des autres… 

Jésus, lui, affirme cette bonne nouvelle : le bonheur n’est pas que pour les forts et les bien portants. Il est aussi pour ceux que l’histoire est en train d’écraser.

 

La clé du bonheur est dans l’avenir

 

Bien sûr, pas question de dire à des gens qui sont dans la peine, ceux qui viennent de perdre un proche à Nice par exemple,  « vous êtes heureux ! Mais Jésus annonce pourtant que ceux qui pleurent maintenant seront consolés, et là sera leur bonheur

Car Jésus n’enseigne pas ici un bonheur présent, mais à venir, un bonheur vers lequel tendre notre vie, notre cœur. L’organisation de chaque phrase le montre : « Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés ! »

« Heureux ceux qui sont doux, car ils recevront la terre en héritage ! ».

 

A chaque fois, deux parties. La première bien ancrée dans le présent, avec ses difficultés et ses possibilités d’engagement, mais la deuxième qui ouvre vers un bonheur au futur. « Ils seront consolés, ils verront Dieu… ». 

Ainsi chaque béatitude part d’une situation présente pour l’ouvrir à un bonheur futur. La clé du bonheur, dit en quelque sorte Jésus, se trouve quelque part dans le futur… et c’est encourageant. 

Jésus révèle qu’il n’y a pas de voie dans issue, et il ouvre l’horizon vers un bonheur possible : être consolé… recevoir de la bonté à son tour… Et surtout, voir Dieu ! 

 

Horizon Dieu 

 

C’est là, assurément, le principal bonheur promis : Voir Dieu en personne :  « heureux . Heureux ceux qui ont le cœur pur, car ils verront Dieu ! »

Avant d’être une situation, des choses à vivre, notre avenir c’est quelqu’un, c’est Dieu

Eh effet, qui va consoler, donner la terre en héritage et combler tous ceux-là ? Dieu lui-même, qui n’est pas nommé, selon la tradition juive. 

En somme, les « heureux » le seront parce que Dieu va intervenir dans leur vie – et pas seulement après la mort, car la première et la dernière béatitudes, qui sont au présent, affirment que le Royaume des cieux est déjà pour ceux qui sont humbles et ceux qu’on persécute à cause du Christ. Dieu est déjà avec eux. Il ne les laisse pas seuls mais leur offre son intimité, ils sont ses enfants. 

 

Or quand on vit dans l’intimité de Dieu, le mot « bonheur » prend tout son sens. Nous sommes faits pour être en communion avec Dieu, pour aimer et être aimé dans le flot de son amour, et c’est donc en lui, avec lui, que se trouve la joie parfaite. La paix qui dépasse les circonstances. 

 

Un antidote au désespoir du monde

 

Pourtant,  à l’écoute de ces Béatitudes, comment ne pas sentir combien elles sont provocantes, voire insensées, au regard de nos réalités ? Jésus ose faire retentir le mot « bonheur » en plein milieu de la vie telle qu’elle est, il ose promettre le bonheur… Comment le croire ? Nous qui avons entendu tellement de promesses non tenues ? 

Depuis longtemps, on accuse Jésus d’être un charlatan, un dealer utilisé par l’Église pour endormir les gens avec des promesses lointaines, et ainsi mieux les exploiter. La religion, opium du peuple… sans doute ! Quand on voit comment la religion peut transformer des hommes en assassins, mieux vaut se méfier. 

Mais les Béatitudes, loin d’être un opium qui endort, sont plutôt un elixir de vie, un antidote au désespoir du monde. Antidote dont la valeur a été prouvée par la vie de Jésus lui-même. 

 

Le secret de la vie de Jésus

 

En effet, comme l’écrit Daniel Bourguet dans une méditation de ce passage (qui a amplement inspiré la mienne !), les Béatitudes décrivent Jésus. Elles sont, dit-il, « le secret de l’existence de Jésus ». 

De fait, Jésus a été pauvre, et humble. Et Dieu par lui a ouvert son Royaume à l’humanité. 

Il était doux, artisan de paix. Il a pleuré devant le tombeau de son ami Lazare. Et le Père l’a consolé, en ramenant Lazare à la vie. 

Surtout, il a été crucifié et rejeté. Mais Dieu l’a ressuscité, et amené dans la gloire, et il règne aujourd’hui au-dessus de tout ce qui existe. 

Jésus a vécu toutes les Beatitudes. 

 

Alors, parce qu’il a déjà parcouru ce chemin, Jésus peut nous y conduire, et son Esprit nous est promis pour cela, si nous lui faisons confiance. Mais tout en ouvrant un horizon d’espérance, il ne cache pas que ce chemin vers le bonheur est aussi un chemin de croix. « Le disciple n’est pas plus grand que son maître », dit Jésus, à plusieurs occasions – et toujours lorsqu’il évoque les difficultés, les persécutions associées à l’engagement pour lui. 

«  On vous exclura des synagogues, dit-il à ses disciples. Et même, l'heure vient où ceux qui vous tueront s'imagineront rendre un culte à Dieu de cette façon » (Jean 16.2). 

Quelle actualité pour nous ! 

Oui, suivre Jésus n’est pas de tout repos, c’est un chemin exigeant, mais le Ressuscité lui-même marche avec nous, et la puissance de son Esprit est promise à ceux qui le suivent. Chaque passage où il évoque la persécution ouvre sur cette promesse. Et avec le don du Saint Esprit, promesse aussi d’une joie supérieure : « Réjouissez-vous, criez votre joie, car une grande récompense vous attend dans les cieux ».

 

Sur le chemin, des tentations

 

Je crois que ces paroles sont un rappel nécessaire, pour nous chrétiens, aujourd’hui. Dans notre désir de suivre Jésus, nous sommes confrontés à des tentations puissantes, sur pleins de fronts à la fois. Il y a des tentations pour chaque Béatitudes, et même plus ! 

 

 « Heureux ceux qui sont humbles de cœur »… ne sommes-nous pas plutôt enclins à l’exigence, la recherche de contrôle, qui confine à l’orgueil ? 

 

« Heureux ceux qui pleurent »… ne préférons nous pas éviter la souffrance à tout prix, quitte à fuir dans le travail, dans les paradis artificiels offerts par nos écrans, dans le travail, l’alcool… Préférant cacher nos vulnérabilités et notre besoin profond d’être consolé ? 

 

« Heureux ceux qui sont doux… »…« ceux qui ont faim et soif d'un monde juste »… « les artisans de paix », « ceux qui sont pleins de bonté pour les autres »… Avoir faim et soif d’un monde juste, oui ! Mais quand on voit les perspectives, pour le climat par exemple… 

Depuis que je suis jeune adulte, j’entends des scientifiques égrener le compte à rebours de la destruction de la Terre : plus que x années avant la disparition des dernières espèces sauvages… si on dépasse tant de degrés, des millions de personnes vont voir leur vie impactée sévèrement, voire dramatiquement… pourtant les comportements qui nous conduisent dans le mur ne semblent pas changer vraiment…

Alors est-ce qu’il n’y a pas de quoi être en colère, plutôt, ou baisser les bras ? Face à la violence et à la dureté des cœurs, est-ce qu’on aurait pas envie plutôt de rentrer dans le tas ?

Et puis affirmer « Heureux êtes-vous quand on vous insulte, quand on vous persécute …». Peut-être qu’aujourd’hui même, ces paroles seront lues aussi dans la basilique de Nice, là-même où trois personnes ont été assassinées jeudi. Comment ces mots vont-ils être reçus ?! Que dire de la haine religieuse qui frappe, partout, jusque dans nos Églises ? 

 

Il est tout à fait possible que nous soyons saisis par l’envie de nous confiner non seulement physiquement mais intérieurement…. L’envie de nous protéger des autres. Ces « autres » qu’on se voit se promener sans masques… qui peuvent sortir un couteau pour nous attaquer… 

 

 « Heureux ceux qu'on persécute » à cause de Jésus…  

Qui n’a pas peur de cela ? La tentation ici serait de masquer notre engagement pour le Christ afin d’éviter les problèmes, voire de nous laisser assimiler par le monde au point de lui obéir davantage qu’à Dieu… 

 

En marche !

 

Mais au contraire, par ces Beatitudes, Jésus nous appelle à rester mobilisés pour Dieu. 

A résister à ces tentations, ensemble, en solidarité avec tous les autres chrétiens – parce que le « heureux » est collectif ! et que dans la persécution, nous sommes proches des prophètes et de tous ceux qui souffrent pour Jésus… 

Résister, s’engager : la traduction Chouraqui de ce passage d’ailleurs met en lumière un jeu de mot dans la langue originale qui nous encourage dans ce sens : derrière le mot « heureux » se cache un… « en marche » ! Au point que Chouraqui traduit : « en marche les endeuillés, en marche les doux, en marche les faiseurs de paix »… ! 

 

Évidemment je suis conscient de la portée politique de cette traduction aujourd’hui ! Loin de moi l’idée de faire passer des messages subliminaux (assez énormes) pour vanter le parti du même nom – la neutralité est de rigueur ici. 

Mais gardons cette invitation, qui vient de bien plus haut que le gouvernement – de Dieu lui-même  – à rester « en marche » avec Christ, sans nous laisser arrêter par le désespoir, ou l’inquiétude… par le poids de noirceur de ce monde. 

Jésus a vaincu la mort et la maladie, il vient bientôt établir son Royaume et marche déjà avec nous, si nous mettons notre confiance en lui. 

 

Alors vivons ce temps de confinement avec lui

Autant que nous le pouvons, mettons-nous à l’écart avec lui, asseyons-nous à ses pieds comme les disciples ici, pour écouter sa Parole et prier. 

Surtout ne nous laissons pas accaparer par l’esprit du temps, ni contaminer par le pessimisme ambiant, l’amertume galopante. Mais au contraire, que l’antidote de la Parole de Dieu nous réveille, nous ressuscite et nous remplisse d’une vie et d’une joie nouvelle, dans ces circonstances où le monde, plus que jamais, a besoin de la lumière de Christ. 

Alors faisons)là briller, humblement, doucement, comme des artisans de paix. Faisons tout notre possible pour bénir ce monde troublé et témoigner de l’espérance. 

A Dieu seul soit la gloire ! 

Amen

 

 

Temps de réflexion : 


Quels sentiments agitent notre cœur ? S’ils sont négatifs, confions les au Seigneur et demandons lui son aide. 


S’ils sont positifs, louons le Seigneur ! Qu’il fasse de nous ses témoins en ce temps de confinement. 

 


 

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