Prédication du 2 juillet 2017 : Le jugement de Dieu, une bonne nouvelle ? - Romains 8.31-39 (S. Guiton)
Le texte de la Bible que nous allons méditer ce matin nous annonce une bonne nouvelle : Dieu est notre juge ! N’est-ce pas merveilleux ?
Oui, un jour, tous les morts ressusciteront, qu’ils soient chrétiens ou non, et nous serons tous jugés individuellement par Dieu.
C’est une bonne nouvelle, non ?
Le jugement de Dieu, une bonne nouvelle…
Cela vous étonne ?
Alors écoutons ce que dit l’apôtre Paul dans sa lettre aux Romains.
Romains 8.31 - 39
31 Que dirons-nous donc de plus ? Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? 32 Lui qui n'a pas épargné son propre Fils mais l'a donné pour nous tous, comment ne nous accorderait-il pas aussi tout avec lui? 33 Qui accusera ceux que Dieu a choisis ? C'est Dieu qui les déclare justes ! 34 Qui les condamnera? [Jésus-]Christ est mort, bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu et il intercède pour nous ! 35 Qui nous séparera de l'amour de Christ ? Serait-ce la détresse, l'angoisse, la persécution, la faim, le dénuement, le danger ou l’épée ? 36 De fait, il est écrit : C'est à cause de toi qu'on nous met à mort à longueur de journée, qu'on nous considère comme des brebis destinées à la boucherie.
37 Au contraire, dans tout cela nous sommes plus que vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. 38 En effet, j'ai l'assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni le présent ni l'avenir, ni les puissances, 39 ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur.
Ce passage est d'abord une merveille de style. Combien de chrétiens ont été encouragés, soutenus par ces quelques mots écrits entre 56 et 58 ap. JC. Paul est alors en voyage missionnaire à Corinthe.
Etonnamment, ce sublime cantique à l’amour est composé autour d’un thème juridique : Paul nous place ici au milieu d’un procès. Il y a les accusateurs, le juge, l’avocat, et l’accusé.
Le chef d’accusation est sous-entendu, mais le contexte ne laisse pas de doute : c’est le péché, qui abîme nos coeurs, impacte nos relations humaines, notre amour, et nous rend étrangers à la vie, à la présence de Dieu. « Aucun être humain n'est juste, même pas un seul ! Personne n'est intelligent, personne ne cherche Dieu !
Tous ont quitté le bon chemin, ils sont tous corrompus. Personne ne fait le bien, même pas un seul ! » (Ro 3.11-12).
Il n'y a pas de différence entre les hommes, dit Paul : « tous ont péché et tous sont privés de la gloire de Dieu »( Ro 3.23)
L’accusé, c’est donc chacun d’entre nous, que nous en soyons conscients ou non. Accusés de participer au mal même comme simples complices, en ne vivant pas pleinement l’amour pour lesquels nous avons été créés. Amour des autres. Amour de Dieu. Et aussi amour de nous-mêmes.
C’est sur notre amour surtout que nous allons être jugés : quel sera le bilan ?
Face à nous, les accusateurs : ils sont variés, nous y reviendrons. Mais curieusement, Dieu ne se place ici dans ce rôle : lui, il est le juge. Et en même temps, il est l’avocat. Et en même temps - et c’est le plus incroyable - Dieu est celui qui est condamné à la fin du procès. C’est Dieu, en Jésus-Christ son Fils, qui paie ce qu’il y a à payer pour le mal qui détruit le monde.
Quel étrange procès ! Est-ce que c’est juste, au final ? Oui, certainement, puisque Dieu est parfaitement juste. Mais il est aussi parfaitement amour ! Comment alors fait-il pour harmoniser son amour, qui veut nous réconcilier avec lui, et sa justice, qui demande que le mal soit jugé ?
Voilà la bonne nouvelle, le coeur de notre foi, ce que nous allons célébrer par la Sainte Cène tout à l’heure ; voilà le sens de cette croix derrière moi : comme un juge étrange, Dieu a purgé lui-même la peine qu’il a prononcé !
Il « n'a pas épargné son propre Fils mais l'a donné pour nous tous ».
Paul insiste sur cet événement historique : la mort de Jésus de Nazareth, à Jérusalem, au début du premier millénaire, a clôt notre dossier pénal devant Dieu. Si du moins nous acceptons d’y croire, car cela, c’est notre liberté.
Par la mort de Jésus, Dieu déclare justes ceux qui croient.
Romains 3.21-24 : « Dieu rend justes les êtres humains par leur foi en Jésus-Christ. Il le fait pour tous ceux qui croient au Christ, parce qu'il n'y a pas de différence entre eux : tous ont péché et tous sont privés de la gloire de Dieu. Mais dans sa bonté, Dieu les rend justes gratuitement par Jésus-Christ, qui les libère du péché. Dieu l'a offert en sacrifice. Alors par sa mort, le Christ obtient le pardon des péchés pour ceux qui croient en lui. »
La mort volontaire de Jésus prouve l’amour de Dieu pour nous, tout en satisfaisant sa justice.
Est-ce que nous méritons de partir libres ? Est-ce que nous sommes vraiment innocents ?
Si nous sommes honnêtes avec nous-mêmes, et que nous examinons notamment notre amour, la réponse est non. Et nous pouvons être victimes de notre passé, blessés affectivement, nous restons pourtant responsables de nos actes.
Responsables de ce que nous faisons de notre vie, de nos blessures même.
Cela, Dieu ne le nie pas. Il sait très bien que nous ne méritons pas cet amour pur et parfait qu’il déverse sur nous. Mais il choisit de nous déclarer innocents. C’est un acte juridique, avant tout. La sentence tombe pour tous ceux qui acceptent de croire en Jésus : « innocent ! ». « Saint et pur de tout péché devant Dieu ».
Ensuite, tout reste à faire, car cette déclaration d’innocence ne nous change pas intérieurement. Devenir réellement saint, ce sera le travail de toute notre vie. Mais cela devient possible car le Saint-Esprit, qui vit en nous, guérit nos coeurs, pour nous rendre capables d’aimer dans la liberté.
Une fois que Dieu nous déclare justes, il n’y a plus de retour en arrière : « Qui accusera ceux que Dieu a choisis ? C'est Dieu qui les déclare justes ! Qui les condamnera? [Jésus-]Christ est mort ».
« Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? ».
Le fondement de notre foi est là : Dieu est pour nous. Alors l’espérance est permise.
« Dieu est pour nous ». Je sais que la formule fait souvent grincer des dents, parce qu’elle a été utilisée pour justifier les pires horreurs. Cette dérive est présente aussi chez certains chrétiens un peu trop conquérants face aux autres hommes, oublieux de leur propre péché et de l’humilité profonde que la foi exige.
Ce texte même interdit à quiconque de prétendre posséder Dieu, de l’avoir dans son camp contre d’autres êtres humains, car « tous ont péché ». « Est-ce qu'il y a encore des raisons de se vanter ? Non, pas du tout ! », écrit Paul en Romains 3.
Si Dieu est pour nous, c’est comme ce juge qui choisit de nous déclarer innocents.
Si Dieu est pour nous, c’est comme Jésus notre avocat, ressuscité et élevé au dessus de tout ce qui existe , qui « intercède », qui prie le Père pour nous. Qui prend en ce moment même notre défense devant Dieu, alors que nous ne méritons rien.
Si Dieu est pour nous, enfin, c’est contre ceux qui nous accusent. « Qui accusera ceux que Dieu a choisis ? ». « Qui les condamnera ? ».
Voilà peut être ce qui nous touche au plus près, dans tout ce texte : la question des accusateurs.
Qui sont-ils ?
Le fait est que nous pouvons nous sentir accusés de bien des façons. Par les opposants au christianisme bien sûr ; Paul qui a beaucoup voyagé connait mieux que quiconque la force de l’opposition à l’Evangile. Un peu partout se trouvent des adversaires résolus de la foi et de l’Eglise.
Le premier des accusateurs, ça peut être aussi… nous-mêmes ! Notre conscience. Combien d’entre nous se battent avec une mauvaise estime d’eux-mêmes, au point de se sentir toujours en dessous des attentes ? Au point de se sentir indignes, voire perpétuellement coupables ?
Parfois le sentiment de culpabilité est justifié, et nous pousse à demander pardon pour quelque chose de précis. Mais, sur le chemin de notre vie, de nombreuses voix accusatrices peuvent nous faire douter de nous-mêmes, des autres, et de Dieu, sans que ce soit juste. Elles accusent notre identité, notre valeur. Touchent notre désir d’être reconnus. Appréciés. Intégrés dans un groupe.
D’être aimés, en somme, juste aimés !
« Je n’y arriverais jamais » ; « si je suis seul, c’est que je le mérite » ; « personne ne peut m’aider, vu comment je suis » ; « je n’ai rien à dire » ; « je ne sais rien faire » ; « je suis nul».
D’où viennent de telles paroles accusatrices ? Jamais de Dieu, car il est « pour nous ».
Elles impactent en tout cas notre compréhension de l’amour de Dieu, et de notre position devant lui.
Si j’ai intégré l’idée qu’on ne m’aimerait qu’à condition que - je sois premier de la classe, je sois beau, je ne fasse pas de problèmes, j’aie réponse à tout, je réalise le rêve de mes parents, etc. - il peut m’être difficile de recevoir comme une eau vivifiante la déclaration d’amour immérité de Dieu.
De plus, même s’il ne fait pas le voir partout, notre adversaire le Diable, que la Bible nomme « l’accusateur des frères » cherche à profiter de nos failles pour nous éloigner de Dieu, nous décourager, nous faire douter de son amour.
Mais lorsque la confusion ou l’angoisse nous empêchent d’y voir clair. Quand nous nous sentons indignes d’être aimés. Quand nous nous accusons nous mêmes, ou que le regard des autres nous renvoie des choses qui nous troublent…
Ou bien au contraire lorsque le miroir de la salle de bain nous renvoie l’image d’un winner qui n’a besoin de personne, et qu’une vanité sournoise nous suggère que nous valons mieux que les autres…
Ces paroles sont le seul fondement sain pour notre identité.
Une prise solide. Un bouclier contre les traits de l’accusateur.
« Il n’y a plus maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ».
« ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni le présent ni l'avenir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ notre Seigneur
Ni anges, ni démons, nous sommes juste ceux que Dieu a choisis, ceux pour qui Jésus est mort, ceux qu’il aime comme ses frères.
Nous sommes ceux qu’il veut rendre « plus que vainqueurs », par son Esprit en nous. « Ceux qui sont en Jésus-Christ ».
Nous sommes ceux pour qui Jésus le juge de toute la création est descendu de son ciel écrasant et il s’est fait petit parmi les petits.
Nous sommes ceux pour qui il a connu, plus que quiconque, « la détresse, l'angoisse, la persécution, la faim, le dénuement, le danger ou l’épée » dont parle Paul.
Alors, accrochons à cette vérité pour sortir de tous les tribunaux de ce monde, et marcher joyeusement dans la liberté, sous le regard bienveillant de Dieu notre Père.
Dans la foi, c’est-à-dire la confiance.
Dans l’espérance, car autant passé, si lourd soit-il, ne peut empêcher l’amour de Dieu de nous guérir.
Et l’amour, bien sûr.
Prière :
Seigneur, je t’adore, toi qui a donné ton Fils innocent pour moi, alors que je ne me préoccupais même pas de ton existence.
J’ai souvent du mal à croire que tu m’aimes comme je suis. Que tu sois « pour moi » alors que moi-mêmes, je doute de ma valeur. Que tu ne m’accuses plus, en Jésus, alors que je suis si fort pour me juger moi-même, me trouver en dessous, à côté, pas assez ceci ou trop cela.
Je veux placer ton amour, ton approbation, la déclaration d’innocence que tu m’accordes en Jésus, au centre de mon estime de moi-même, de mon identité.
Ne plus écouter les accusateurs, et vivre pleinement comme l’enfant pardonné et rempli de l’Esprit que je suis, par ta grâce.
Dans le nom de Jésus,
Amen
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