Prédication du dimanche 23 décembre 2018 - Luc 2.1-20 - « Marie retenait toutes ces choses et y réfléchissait ». (S. Guiton)


Prédication du dimanche 23 décembre 2018
Luc 2.1-20
« Marie retenait toutes ces choses et y réfléchissait ».


Comme beaucoup d’entre vous sans doute, quand j’étais petit, j’ai construit mon imaginaire de Noël en lisant des livres pour enfants. Pleins de belles images. 
En cette veille de Noël, je vous propose de feuilleter ensemble, directement, non pas un livre pour enfants mais l’album image original de Noël - le livre de Luc. (Luc 2.1-20).

Arrêtons-nous ensemble sur quelques images. Quatre exactement.  

Première image (v.1-5) : on voit un couple en train de marcher sur une piste de campagne. A quelle période de l’année se trouve-t’on ? Pas facile à dire. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a pas de neige comme dans les images traditionnelles. C’est rare dans cette partie du monde. 
Pas contre, ce couple qui marche, ce sont bien Joseph et Marie, les parents de Jésus. Ils ne sont pas seuls : il y a tout un groupe de gens avec eux, partis ensemble de Nazareth, en Galilée, la petite bourgade où ils habitent dans le nord d’Israël, pour se rendre à Bethléem, près de Jérusalem, à 150 kms de là. 
Tout ça parce que l’empereur Auguste a décidé de faire recenser tous les habitants de l’Empire Romain, pour vérifier que tout le monde paie bien ses impôts. Parce qu’il veut plus de pouvoir et richesses.  

Entre Nazareth et Bethléem, le chemin est long, on le fait à pied, en âne ou en chameau. Pas facile pour Marie, qui a découvert il y a bientôt 9 mois qu’elle était bien enceinte, comme l’avait annoncé cet ange qui lui est apparu. Ce n’était donc pas un simple rêve : l’origine divine de la Parole annoncée est confirmée par les faits. Le bébé est là, elle le sent bouger. Mais Marie ne s’arrête pas, encouragée par les larges épaules de Joseph qu’elle voit devant elle. Brave Joseph, qui a accepté de rester avec elle bien qu’elle soit enceinte d’un autre que lui. 
Marie sourit en marchant. Elle n’est pas seule. Elle a de la chance de l’avoir, Joseph. En plus, tout artisan qu’il est, c’est quand même quelqu’un qui fait partie de la prestigieuse famille du roi David ! En même temps, c’est pour ça qu’ils doivent aller jusqu’à Bethléem pour se faire recenser… Bethléem… c’est pas là que le prophète Michée dit que le Messie doit naître ? Ce Messie qui doit être un descendant de David, lui aussi ? 
Alors qu’elle marche vers cette ville lointaine qu’elle ne connaît pas, à cause de la soif de pouvoir d’un empereur et parce qu’elle est fiancée à un descendant de David… Marie se dit peut-être que décidément, la façon d’agir du Seigneur est bien mystérieuse. Mais même si elle ne comprend pas tout, elle se tient à ce qu’elle a répondu à l’ange : « Je suis l’esclave du Seigneur ; . Que Dieu fasse pour moi ce que tu as dit !  ».

Est-ce que nous aussi, nous suivons Dieu avec confiance, même si cela doit nous amener sur des routes inconnues, même si nous ne savons pas où cela nous mène ? 
Est-ce que nous sommes prêts à lui obéir, même si cela bouleverse nos projets ? 

Deuxième image (v.6-7) : ça y est ! Marie a accouché ! On reconnait la scène familière de Noël : Marie fatiguée mais souriante, le bébé Jésus, Joseph un peu empoté comme tous les nouveaux pères, mais heureux lui aussi, émerveillé de ce miracle, attendri et plein d’amour pour cette jeune femme et pour le bébé. Et tant pis s’il n’est pas de lui : Joseph est un homme droit, il fera ce que Dieu lui a ordonné. Cet enfant a besoin d’un père, ce sera lui. 
Sur l’image, Marie est en train de coucher Jésus dans une mangeoire pour animaux, elle l’enveloppe de linges serrés comme on le faisait à l’époque. Elle a l’air pensive ; la fatigue, peut-être ? Peut-être aussi qu’elle pense aux paroles de l’ange, à ses promesses concernant cet enfant: « Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n’aura pas de fin ».


Quel décalage entre ce glorieux destin et ce qu’elle voit ; il a l’air pourtant bien normal, ce bébé qui pleure. Sans elle, il n’irait pas bien loin. Comment imaginer que c’est Dieu en personne ?! Le grand Dieu d’Israël, dont elle a entendu le récit des exploits extraordinaire pendant toute sa vie, ce grand Dieu saint et terrible qui serait là, fragile, attendant la tétée ?! 
On ne le voit pas sur l’image, mais il n’a pas dû échapper à Marie que les lieux où l’enfant est né ne sont pas à la hauteur d’un tel roi. Sur l’image, on devine qu’on est dans la pièce de la maison réservée aux animaux. Comme les amis chez qui Joseph et Marie devaient loger avaient déjà prêté leur chambre d’amis, le jeune couple a dû se réfugier dans ce coin-là de la maison. 
Ça reste un endroit bien modeste pour accueillir le « Fils du Très-Haut ». 
Marie borde Jésus. Son enfant. Quelques temps avant, son cousin Zacharie a prophétisé l’arrivée du « soleil levant », de « l’astre d’en haut venu nous visiter ». Est-ce de son enfant dont il parlait ? 
Marie pense à cela. Décidément, quel Dieu mystérieux ! 

Ce qui me frappe, dans cette image de la crèche, c’est la banalité de ce que je vois. Certes, le lieu est inhabituel et un jeune couple avec son bébé, c’est magnifique, mais rien de surnaturel à l’oeil nu en tout cas. Il semble que la tradition ait essayé de rajouter du sensationnel dans la scène, en mettant un âne et un boeuf qui réchauffent l’enfant, des lumières féériques, en faisant de Jésus un enfant potelé irradiant d’une lueur surnaturelle… Mais au contraire, l’extraordinaire pour moi est que le Créateur de l’univers soit ainsi présent dans la vie « normale », suivant toutes les règles qu’il a lui-même fixées, « l’astre d’en haut » devenu véritablement homme, par amour pour moi. 
Est-ce que je crois que Dieu est présent de la même manière dans le cours de ma vie « normale », ou bien est-ce que je l’attends dans l’extraordinaire, le miracle ? Est-ce que je le crois sur parole quand il me dit qu’il est là tous les jours, qu’il vit même en moi par son saint Esprit ? Est-ce que je laisse sa Parole me révéler le véritable sens du monde autour de moi, le véritable sens de ce que je vis, ce qui je suis… ou bien suis-je conduit par ce que je vois, par ma vue, mes impressions, mes idées ? 

Troisième image (v.8-20) : Joseph et Marie ne sont plus seuls autour de leur bébé : il y a là tout un groupe d’hommes qui ont débarqué dans la pièce. A leurs vêtements, aux bâtons solides qu’ils tiennent, on devine que ce sont des bergers de la région. Plusieurs d’entre eux sont en train de raconter quelque chose à Joseph et Marie, ils ont l’air très excités ! Leurs yeux brillent, ils sont pleins de joie et de stupéfaction, ils font des grands gestes avec les mains, montrent le ciel avec le doigt… ! Grâce à Luc, nous savons ce qu’ils sont en train de raconter : pendant la nuit, alors qu’ils gardaient leurs troupeaux comme d’habitude, ils ont vu soudain un ange du Seigneur apparaître devant eux et leur parler, entouré de « la gloire du Seigneur », comme ils le disent, la gloire du Seigneur qui s’est mise à briller autour d’eux. Alors l’ange leur a dit : « N'ayez pas peur, car je vous annonce la bonne nouvelle d'une grande joie qui sera pour tout le peuple : aujourd’hui, dans la ville de David, il vous est né un sauveur, qui est le Christ, le Seigneur. Et ceci sera pour vous un signe : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ». Alors, tout d’un coup, une multitude d’anges de l'armée céleste étaient apparus aux bergers, des anges qui louaient Dieu et disaient : « Gloire à Dieu dans les lieux très hauts, et, sur la terre, paix parmi les humains en qui il prend plaisir ! ». 

Sur l’image, on voit bien que les bergers sont encore sous le choc. A cause de ce qu’ils ont vu bien sûr. Sous le choc aussi d’avoir été choisis par Dieu, eux qui n’étaient ni des religieux, ni des gens importants, ni particulièrement assidus au Temple. Est-ce que l’ange parlait d’eux quand il disait « paix parmi les humains en qui Dieu prend plaisir ? ». Ils n’en reviennent pas. Alors bien sûr, ils n’ont pas hésité un instant et ils ont accouru à Bethléem pour voir le fameux enfant, et raconter à ses parents ce qui leur a été dit à son sujet. 
Dans la scène, c’est la stupéfaction qui domine, sur le visage de tous. On voit de la joie aussi, une joie un peu sceptique mais réelle : « il vous est né un Sauveur, le Christ », le Messie… ça y est, c’est donc vrai ? Il est vraiment venu, celui qu’Israël attend depuis des siècles ? Et c’est lui, là, ce bébé ? Oui, l’ange a été formel. 

Est-ce que je crois que Dieu me parle, à moi aussi, même si je suis quelqu’un d’ordinaire ? Est-ce que je crois que cette joie qui vient de lui est pour moi aussi ? 

Quatrième et dernière image : gros plan sur le visage de Marie, entourée des bergers. 

Encore une fois, on lit l’étonnement sur le visage de Marie. Plus précisément, un mélange  d’étonnement, de gravité et de joie, si c’est possible de mêler des sentiments aussi différents ! 
« Marie retenait toutes ces choses et y réfléchissait », dit Luc. En grec, il dit plus exactement : « Marie gardait intact, précieusement, près d’elle », tout ce qui se passait, et elle le « méditait dans son coeur ». Elle y réfléchit. Le grec insiste sur le fait qu’elle est en train de réfléchir à tout ça, sans avoir le fin de l’histoire.

Comment ferait-elle autrement ? Voilà encore une révélation sur l’identité de son bébé qui lui arrive de la bouche d’autres personnes, inconnues celles-là ! Avant, il y a eu l’ange bien sûr, mais aussi Elisabeth sa cousine plus âgée, dont l’enfant a « bondi d’une joie immense » dans son ventre quand elle l’a rencontrée et qui, sous l’inspiration du Saint Esprit, lui a confirmé elle aussi que l’enfant qu’elle portait était bien le Seigneur lui-même. Marie n’a pas oublié les paroles de bénédiction de sa cousine : « « Tu es bénie plus que toutes les femmes, béni aussi est le fruit de ton sein ! » ; « Bienheureuse celle qui a cru : ce qui lui a été dit de la part du Seigneur s’accomplira ! ». Ces paroles lui ont fait tellement de bien ! Pas facile pour elle d’être enceinte sans avoir eu de relations avec un homme, d’assumer ça aux yeux de sa famille, de sa communauté certainement scandalisée… Pas facile de le dire à Joseph… de porter ce mystère en se demandant si l’ange était bien réel.

Mais après ces paroles d’Elisabeth, en qui elle a toute confiance, et maintenant que Jésus est là, dans sa mangeoire, tout paraît plus clair. 
Cependant, même si le message des bergers semble clair lui aussi, elle ne peut s’empêcher d’être stupéfaite du grand contraste entre ce qu’elle entend du rôle extraordinaire que Jésus va jouer plus tard - il est le Christ, le Sauveur ! - et les circonstances de sa naissance, si simples, si humbles… 

Décidément, la façon d’agir du Seigneur est bien mystérieuse ! Mais tellement belle en même temps ! Choisir un bébé pour sauver le monde…

« Marie retenait toutes ces choses et y réfléchissait ».

Et nous ? 

Comme Marie, est-ce que nous restons vigilants, attentifs à ce que Dieu fait dans nos vies ?  A l’écoute de ce qu’il voudrait nous dire, par les textes de la Bible, dans ce que d’autres chrétien nous disent ? 
Est-ce que nous nous retournons régulièrement sur ce que nous venons de vivre, en essayant d’y voir Dieu ? D’y reconnaitre des réponses à nos prières ? 

Comme Marie, est-ce que restons confiants en Dieu, encouragés par sa parole, fondant notre espérance et notre envie d’aller de l’avant sur les promesses de Dieu, confiants que ce qu’il a promis, il le fera, même s’il semble parfois absent de notre vie ? 

Comme Marie, nous sommes témoins que Dieu a tenu ses promesses : Jésus est venu ! Et il n’est plus seulement dans le ventre de Marie, il vit en chacun de ceux qui croient en lui. En moi, en vous. 

Il y a deux mille, il nous est né un Sauveur, le Christ, le Seigneur. 


Alors en ce temps de Noël, que nous puissions prendre le temps de nous retourner sur ce que Dieu a fait pour nous dans l’année écoulée, dans la prière, dans la reconnaissance, pour, comme les bergers à la fin du texte de Luc, « glorifier et louer Dieu pour tout ce que nous avons entendu et vu », conformément aux promesses de Dieu - et aller de l’avant avec confiance… et joie ! 

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