Prédication du 6 septembre 2020 - Une vie d’intégrité - Genèse 20.1-8 – Psaume 101.1-8 (S. Guiton)
Ce soir-là, quand il se couche, le roi Abimelek ne se doute pas encore de ce qui va lui arriver dans la nuit…
Il a passé une journée riche en émotions, avec l’arrivée dans son palais d’une nouvelle épouse, Sara, nouvellement arrivée dans le pays avec son frère Abraham. Sa beauté l’a vite fait remarquer, une beauté telle qu’elle a pris le cœur d’Abimelek … Alors il a accueilli Sara avec honneur, sans la toucher encore, car c’est un homme délicat.
Ce soir-là, il s’endort paisiblement.
Mais soudain, Dieu lui apparaît dans un rêve et lui dit : « Tu vas mourir à cause de la femme que tu as enlevée, car elle est mariée. »
Stupéfait, Abimélek se défend : quoi ! Mais il ne savait pas ! Abraham et Sara ont affirmé qu’ils étaient frères et sœurs, comment pouvait-il deviner ! Il a agi en toute bonne conscience, Dieu va-t’il le punir quand-même ?
« Moi aussi, je sais que ton cœur est intègre, lui répond Dieu. C'est moi qui t'ai retenu de te rendre coupable envers moi et voilà pourquoi je ne t'ai pas laissé la toucher.
Maintenant rends cette femme à son mari. C'est un prophète ; il priera pour que tu aies la vie sauve. Mais si tu ne la rends pas, sache que tu mourras certainement avec tous les tiens. »
Le lendemain, Abimelek secoué convoque Abraham :
« qu’est-ce que tu nous as fait ?! On ne doit pas se comporter comme tu l’as fait avec moi. Nous avons tous failli mourir à cause de toi ! Qu’est-ce qui t’a pris de faire ça ? ».
Abraham essaie de se défendre :
« Je me suis dit que les gens d'ici n'avaient aucun respect pour Dieu et qu'ils allaient me tuer à cause de ma femme ». Et il essaie de se justifier en expliquant que Sara est un peu sa sœur quand même, en fait…
Que fait alors Abimelek ? Il rend Sara à Abraham, avec en prime toute sorte de richesses, en lui disant même : « mon pays t’est ouvert. Installe toi au meilleur endroit ». Puis il dit à Sara : « Tu vois, je donne mille pièces d'argent à ton frère : c'est le signe qui prouvera à tous tes proches que tu es innocente en cette affaire ».
Étonnant récit, dans lequel Abraham, le père des nations, ne se révèle pas sous son meilleur jour, alors qu’Abimelek, un roi païen, reçoit la faveur de Dieu au point que l’Eternel intervient en personne pour l’empêcher… de pécher !
Quelque chose ici distingue radicalement les deux hommes, quelque chose qui explique que Dieu vienne en aide à Abimelek… une disposition de cœur très importante, sur laquelle je vous invite à nous arrêter ce matin : l’intégrité morale.
« Je sais que ton cœur est intègre », dit Dieu à Abimelek.
1. L’intégrité morale.
Qu’est-ce que c’est ? Le mot hébreu traduit par « intègre » ici désigne le fait d’être entier, complet, sain. Par extension, il exprime la solidité, puis l’innocence, ce qui est entièrement en accord avec la vérité et les faits.
C’est comme si le péché avait un lien avec l’incohérence – et c’est la même chose en français : quelqu’un d’intègre est quelqu’un dont les valeurs, les principes sont cohérents avec ses paroles et ses actes.
Quelqu’un qui garde les 3 P - pensée, paroles, pratique (actes) alignés, surtout quand il est confronté à un choix ou qu’il doit prendre position.
D’ailleurs on parle aussi de « droiture » vs « cœur tortueux ». Pas de détours, rien ne manque, tout est cohérent. Voilà l’intégrité.
La semaine dernière, nous avons évoqué Nathanaël dont Jésus dit : « il n’y a rien de faux en lui ». Nathanaël est un homme intègre.
Certains diront : quelle est la différence avec l’intégrisme ?
Bonne question ! Comme tous les « ismes », l’intégrisme est une déviance de l’intégrité. Peut-être que ce qui les distingue, c’est la prise en compte de l’autre… ou pas. L’intégrité cherche aussi le bien de l’autre, elle se vit dans le dialogue, la rencontre.
L’intégrisme au contraire est sourd. Peu importe l’autre et ce qu’il pense, il impose ses valeurs sans aucun respect.
2. Pourquoi l’intégrité est-elle si importante ?
D’abord, justement à cause des conséquences d’un manque d’intégrité sur les autres, comme le montre cet épisode de la Genèse.
Ici Abimelek est intègre, Abraham, non.
Leur exemple montre que notre intégrité ou notre manque d’intégrité peuvent avoir un réel impact sur notre entourage, dans une dynamique positive ou négative : Abraham qui ment entraîne Abimelek dans le péché et celui-ci frôle la mort. En revanche, Abimelek qui est béni par Dieu bénit Abraham en retour, et agit pour préserver la réputation de Sarah.
Mais être intègre est aussi bienfaisant pour nous.
Les gens vous font davantage confiance quand ils savent que vous faites ce que vous dites, que vous êtes honnête.
Vous n’avez rien à cacher, donc vous ne craignez pas d’être démasqué.
Vous vivez dans la paix, alors que sans cesse devoir dissimuler quelque chose, cela consomme une énergie considérable… ça use, ça abîme. Ca tourmente, même si on ne veut pas se l’avouer et qu’on rationalise nos incohérences comme Abraham ici : « oui j’ai fait dire à Sara qu’elle était ma sœur mais en fait c’est un peu vrai aussi, elle est la fille de mon père mais pas de ma mère… ». Pauvre tentative d’auto-justification, qui n’améliore rien.
Le manque d’intégrité est une réalité hélas ! terriblement banale dans nos vies.
Les glissements sont subtils, le plus souvent.
Par exemple, je peux dire à un collègue : « bravo pour ce que tu as dit en réunion », et c’est bien ce que je pense. J’ai la conviction qu’il faut valoriser les autres, et apprendre ainsi l’humilité. Je peux le faire parce que je suis en sécurité avec ma propre valeur, dont Dieu est le garant parce qu’il m’aime comme je suis. Je suis en phase avec moi-même, en paix.
Mais je peux aussi dire : « bravo pour ce que tu as dit en réunion », alors que je ne suis pas si admiratif que ça en réalité, je suis même un peu jaloux de ne pas avoir pensé à dire ce qu’il a dit, alors je me rapproche de lui pour me faire bien voir, pour partager son charisme…
Les deux attitudes ne produiront pas les mêmes fruits, et Dieu n’est pas dupe.
Si nous nous habituons à vivre avec des dissonances – entre ce que nous croyons et ce que nous vivons, entre notre foi en Christ et nos choix personnels ou professionnels, entre nos paroles et nos actes… comment pouvons-nous espérer être en harmonie avec les autres… et avec Dieu ?
Voilà pourquoi la Bible insiste sans cesse sur l’importance de l’intégrité, de la cohérence entre nos pensées – nos convictions, nos valeurs - nos paroles et notre pratique – nos actes.
Petit florilège :
Celui qui marche dans l’intégrité marche avec assurance, Mais celui qui prend des voies tortueuses sera découvert. (Proverbes 10:9)
L’intégrité des hommes droits les dirige, Mais les détours des perfides causent leur ruine.
(Proverbes 11:3)
Que votre parole soit oui, oui, non, non ; ce qu’on y ajoute vient du malin. (Matthieu 5:37)
Parvenu à ce point, on pourrait formuler deux principes :
Deuxième principe :
Même si ça nous coûte et que d’autres options nous attirent davantage.
Au final, l’intégrité concerne plus notre identité personnelle que nos actes. C’est ce que nous sommes, notre cœur, qui détermine ce que nous faisons.
Voilà pourquoi l’Ecriture prévient : « Veille sur ton cœur plus que sur toute autre chose, car de lui viennent les sources de la vie ». Proverbes 4.23.
3. Comment grandir.
Nous savons tous qu’il est difficile d’être intègre. Tous ceux qui essaient de mener une existence écoresponsablecohérente comprennent vite cela !
Comment grandir en intégrité ? Quelques pistes de travail.
Piste 1 : prendre une décision ferme : « Avec ceux qui m'entourent, je me conduirai d'un cœur intègre « (Ps 101.2)
Comme le Psaume 51 le révèle, David n’a pas toujours été intègre dans son comportement, et pourtant la Bible le désigne comme « un homme selon le cœur de Dieu », à cause de son désir sincère de plaire au Seigneur.
Dans le Psaume 101, il établit une sorte de contrat d’engagement à l’intégrité devant Dieu, qui commence par une décision ferme : « Avec ceux qui m'entourent, je me conduirai d'un cœur intègre ». Que cette décision soit aussi la nôtre !
Car quelqu’un a dit que l’intégrité était une qualité « chèrement acquise » : cela demande beaucoup de discipline, et un travail exigeant sur nous-mêmes, pour l’acquérir.
Piste 2 : « Qu’est-ce qui t’a pris ? »
Nous pouvons travailler cette question qu’Abimelek pose à Abraham : « On ne doit pas se comporter comme tu l’as fait avec moi. Qu’est-ce qui t’a pris d’agir ainsi ? ».
Quand nous nous surprenons à ne pas être intègre, interrogeons-nous : qu’est-ce qui m’a pris de ne pas dire ce que je pensais ? De dire ou de faire quelque chose d’aussi contraire à mes valeurs, à mes convictions ? De dire oui à quelque chose que je désapprouve ?
Décider d’être moins gentil pour aimer davantage…
« Qu’est-ce qui t’a pris de faire cela ? ».
En interrogeant cela, je « veille sur mon cœur ». Et j’apprends aussi à repérer ce qui se passe en moi dans les interactions avec les autres, pour ne pas me laisser « prendre », entraîner :
« Qu’est-ce qui m’a pris » de dire à cette personne que ça ne me gênait pas de lui laisser ma place dans la file alors qu’en réalité j’étais dégoûtée ?
Souvent, si nous ne respectons pas nos propres valeurs, nos propres convictions, c’est parce que nous sommes trop « gentils » - nous n’osons pas affirmer nos convictions par peur de « faire des histoires », peur du conflit, peur de blesser l’autre, ou pour lui plaire, pour être bien vu…
Mais quand nous nous vendons à quelqu’un d’autre, c’est nous que nous trahissons. Et ce n’est pas forcément bon pour l’autre non plus.
Oser déplaire aux autres parfois, tout en les respectant, mais pour rester cohérent devant soi-même et devant Dieu, c’est peut-être un passage obligé pour grandir en intégrité – pour pouvoir aimer l’autre en vérité, de façon saine et adulte.
Piste 3 : fuir les situations à risque
Tout cela doit nous aider aussi à repérer les situations à risque. Les fuir est recommandé par la Bible : « quand la dispute s’anime, retire toi »…
Nous faisons tous face à des désirs contradictoires, surtout dans des situations d’urgence, de stress, de pression.
Par exemple, il semble que pour Abraham, être en terre étrangère, sous le regard d’inconnus, ce soit angoissant. Il imagine le pire – « ils vont me tuer pour me prendre ma femme » – et cette idée le pousse à chercher une protection dans le mensonge – « c’est ma sœur ». Il oublie que s’il est là, c’est parce que Dieu l’a appelé, ce Dieu qui lui a promis de veiller sur lui.
Dans le Psaume 101, David égrène toutes sortes de situations qu’il s’engage à éviter, pour rester intègre : ne pas nourrir nos pensées de choses malsaines, ne pas traîner avec les médisants…
Y a t’-il des situations, des fréquentations que je devrais éviter pour préserver mon intégrité ?
Conclusion
Malgré nos efforts, nous ne serons jamais à parfaitement intègres, parfaitement cohérents dans ce monde…
Nos imperfections sont des échardes, qui doivent nous garder humbles, plus indulgents avec les autres, et plus dépendants de la grâce du Seigneur.
Si Abraham n’a pas été rejeté pour sa faute, c’est parce que Dieu dans sa grâce avait fait alliance avec lui, et qu’il est fidèle quand il s’engage.
En Jésus-Christ, Dieu a conclu avec nous une alliance éternelle, scellée par son Saint Esprit en nous. Il veut nous aider à devenir de plus en plus comme Jésus, le seul homme parfaitement intègre qui ait existé.
Alors engageons-nous par amour pour lui, et avec lui, à tout faire pour nous conduire d’un cœur intègre avec ceux qui nous entourent », comme David.
Le Seigneur saura créer en nous « un cœur pur », par son Esprit.
Peu à peu, nous gagnerons en liberté intérieure, et nous verrons « les sources de la vie » couler abondamment en nous !
Et nous découvrirons, avec Christ, ce qu’est, vraiment, le bonheur.
Amen
Y a t’il des domaines dans lesquels j’ai du mal à rester intègre, cohérent avec mes valeurs ?
Ai-je des craintes qui m’empêchent d’être cohérent ?
Y a t’-il des situations, des fréquentations que je devrais éviter pour préserver mon intégrité ?
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