Prédication du 19 avril 2019 (Pâques) - Philippiens 3.3-10 – connaître Jésus et la puissance de sa résurrection Sortez de votre coquille ! (S. Guiton)
Savez pourquoi, à Pâques, on mange des œufs ? Parce que l’œuf est depuis longtemps symbole de vie, du mystère de la vie. Là, dans cette coquille, se cache la promesse d’une vie à venir. Un bel oiseau peut en sortir et prendre son envol, comme les fleurs hors de cette belle sculpture d'Oriane Audeoud.
L’espérance de Pâques, c’est cela : l’espérance d’’une vie nouvelle qui triomphe de nos enfermements, de tout ce qui nous tue, qui triomphe de la mort même.
Ainsi, l’évènement extraordinaire de la résurrection de Jésus contient la promesse de notre propre résurrection. L’Esprit de Dieu, qui a ramené Jésus d’entre les morts, veut nous faire sortir de nos coquilles enfermantes pour naitre à une vie nouvelle , et prendre notre envol !
Ainsi, la résurrection de Jésus n’est pas seulement un événement du passé, à commémorer comme un évènement historique. Elle veut changer notre propre vie, et lui donner une orientation nouvelle, comme l’explique l’apôtre Paul, dans un passage de la lettre aux Philippiens que nous allons méditer ensemble.
Le contexte n’est pas sans rappeler le texte de Galates que Fréderic a médité la semaine dernière : parmi les Philippiens, il y a aussi de faux enseignants, qui détournent les chrétiens et qui ne sont motivés que par leur orgueil et leur désir de pouvoir. Ces gens-là enseignent qu’un chrétien doit suivre les rites juifs, notamment se faire circoncire.
Paul est très dur avec ces gens-là : dans le passage que nous allons lire, il les appelle les « chiens », « les mauvais ouvriers » !
Car suivre le légalisme de ces faux enseignants, c’est rester emprisonné dans une coquille qui étouffe la vie de Dieu.
Alors que le désir de Dieu est de déployer en nous cette puissance par laquelle il a ressuscité Jésus, pour nous permettre d’aimer comme lui aime.
Lisons en Philippiens 3.3-10
1Au reste, mes frères, réjouissez-vous dans le Seigneur. Il ne m’en coûte pas de vous écrire les mêmes choses, et pour vous c’est un affermissement.
2Prenez garde aux chiens ! prenez garde aux mauvais ouvriers ! prenez garde aux faux circoncis !
3Car les circoncis, c’est nous, qui rendons notre culte par l’Esprit de Dieu, qui plaçons notre fierté en Jésus Christ, qui ne nous confions pas en nous-mêmes.
4Pourtant, j’ai des raisons d’avoir aussi confiance en moi-même. Si un autre croit pouvoir se confier en lui-même, je le peux davantage, moi,
5circoncis le huitième jour, de la race d’Israël, de la tribu de Benjamin, Hébreu fils d’Hébreux ; pour la loi, Pharisien ;
6pour le zèle, persécuteur de l’Eglise ; pour la justice qu’on trouve dans la loi, devenu irréprochable.
7Or toutes ces choses qui étaient pour moi des gains, je les ai considérées comme une perte à cause du Christ.
8Mais oui, je considère que tout est perte en regard de ce bien suprême qu’est la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur. A cause de lui j’ai tout perdu, et je considère tout cela comme ordures afin de gagner Christ
9et d’être trouvé en lui, n’ayant pas ma justification à partir de la loi, mais à partir de la foi au Christ, la justice qui vient de Dieu et s’appuie sur la foi.
10Il s’agit de le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion à ses souffrances, de devenir semblable à lui dans sa mort,
11afin de parvenir, s’il est possible, à la résurrection d’entre les morts.
Prière
La résurrection de Jésus a réorienté toute la vie de Paul. Le but de sa vie, ce qui a la première place dans ses priorités, c’est cette confiance en Jésus, le ressuscité, et en sa puissance de vie.
« A cause de lui j’ai tout perdu, dit-il, et je considère tout cela comme ordures afin de gagner Christ ».
Voilà ce qui compte vraiment : « Il s’agit de le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion à ses souffrances, de devenir semblable à lui dans sa mort, afin de parvenir, s’il est possible, à la résurrection d’entre les morts ».
Connaître la puissance de la résurrection de Jésus ?! Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ?
A. Quelle est cette puissance dont parle Paul ?
Elle est une puissance de vie à la fois inimaginable, discrète et douce.
Je crois que « la puissance de la résurrection » est au-delà de ce que nous pouvons imaginer. Elle est la toute-puissance de Dieu même.
Dans l’Épître aux Éphésiens, Paul en parle en ces termes : « Que vous sachiez… quelle est la grandeur surabondante de sa puissance envers nous qui croyons, selon l’opération souveraine de sa force. Il l’a mise en œuvre dans le Christ en le réveillant d‘entre les morts » (Ephésiens 1.19-20)
Pour en parler, Paul met ici dans la même phrase tout ce que le grec connaît comme termes désignant la force ! Des termes qui sont à la racine mots comme « dynamite », « énergie », avec plein de « hyper » et de « méga » … ! Littéralement, « la grandeur qui surpasse tout de sa puissance selon l’énergie du pouvoir de sa force »… Tant il est difficile de donner une idée de la puissance infinie de Dieu. ». C’est cette puissance que Dieu a déployée en Christ en le ressuscitant des morts.
Quand la bombe atomique a explosé sur Hiroshima, le monde a découvert avec terreur la puissance qui se cachait dans quelques kilos d’uranium. Que dire alors de la puissance nécessaire pour rendre la vie à un mort ?!
Et aujourd’hui, alors que nous découvrons l’horreur des attentats commis ces dernières heures contre des Eglises au Sri-Lanka… la stupeur devant les puissances de destruction libérées par les hommes continue à grandir.
Face à elle, Dieu lui crée la vie, car « le Père a la vie en lui-même », dit Jésus. C’est cette puissance de vie du Père qui a sorti Jésus du tombeau.
Contrairement à la puissance du mal, qui aime éclater au grand jour et attirer les regards, la puissance de Dieu se manifeste le plus souvent dans la discrétion et la douceur.
C’est comme cela, le matin de Pâques. Quelques témoins seulement, rien de « fracassant » (la pierre même a été roulée, pas brisée). Un tombeau vide, un ange… et l’histoire a été transformée en profondeur.
Certains chrétiens cherchent des manifestations extraordinaires de la puissance de Dieu, dans des guérisons incroyables, des signes vertigineux… C’est possible. Mais ce n’est pas pour rien si le plus grand miracle de l’histoire a lieu dans le silence de la nuit, dans le secret d’un tombeau.
Et c’est la même puissance discrète de la vie qui est capable de briser les pierres les plus dures, comme le font certaines plantes, toutes petites, lorsque leurs racines s’enfoncent dans une roche.
La même puissance qui rend de simples pousses de blé capables de soulever des charges cent fois plus lourdes qu’elles.
C’est ainsi que la puissance de Dieu se déploie dans nos vies : avec douceur, discrétion. Mais en profondeur.
B. Que peut signifier alors pour nous « connaître Jésus et la puissance de sa résurrection » ? Et comment cela est-il possible ?
La résurrection est une des grandes promesses faites à ceux qui croient en Jésus : « Celui qui écoute ce que je dis et qui place sa confiance dans le Père qui m’a envoyé, possède, dès à présent, la vie éternelle et il ne sera pas condamné ; il est déjàpassé de la mort à la vie.» (Jean 5.21,24).
Ça signifie qu’être chrétien, c’est vivre la Pâques pour soi-même. Vivre un moment où on sort de sa coquille pour entrer dans la vie nouvelle avec Christ. Jésus parle aussi de « nouvelle naissance ». Avez-vous vécu cela ?
Tout cela se produit souvent dans la discrétion et la douceur, là encore. Je peux en témoigner dans mon propre parcours. Certains vivent des conversions fracassantes, ce n’a pas été mon cas. Mais en me retournant sur mon propre parcours, je peux voir comment la vie de Dieu travaille à me changer, me libèrer, m’ouvrir peu à peu en profondeur.
Une coquille à l’intérieur qui se fissure, et peu à peu le cœur qui s’élargit…
L’évenement de Pâques montre donc que Dieu ne s’impose pas avec fracas. Il attend que nous lui demandions de venir ainsi éclairer notre cœur et notre intelligence. Nous pouvons lui demander cela avec simplicité.
Et comme la vie est faite pour se propager, se multiplier, se transmettre et engendrer d’autres vies, notre vie nouvelle peut aussi devenir une source de résurrectionpour d’autres, afin qu’eux aussi naissent à la vie éternelle. A cette vie nouvelle, qui fait de celui qui est uni au Christ « une nouvelle créature : ce qui est ancien a disparu, voici : ce qui est nouveau est déjà là. » (2 Cor 5.17)
Christ est vivant ! Il agit pour transmettre en nous et par nous la vie de Dieu.
Et pour que cette vie grandisse en nous et se propage, Paul indique ici le seul chemin : celui de la foi.
Il s’agit de « connaître Jésus » : dans la Bible, « connaître » ce n’est pas juste « savoir », « être au courant ». On peut « être au courant » que Jésus est ressuscité sans « connaître » la puissance de cette résurrection pour nous-mêmes. Connaître ici, c’est rencontrer intimement Jésus le ressuscité, dans une relation personnelle, dans une confiance sincère de personne à personne.
Il y a là quelque chose de fondamentalement simple en réalité : il s’agit de faire confiance à Christ, de faire ce qu’il nous demande et de laisser ainsi la vie de Dieu suivre son cours dans notre vie, par l’action du Saint Esprit.
« Nous rendons notre culte « par l’Esprit de Dieu » (v.3) dit Paul ici.
Cela ne veut pas dire : rester passifs ou se dévaloriser. « J’ai des raisons d’avoir confiance en moi-même, dit Paul. Si un autre croit pouvoir se confier en lui-même, je le peux davantage, moi ». Mais son choix est résolu : compter sur Jésus et son Esprit et pas sur ses propres mérites ou forces.
Lever les freins. Ôter cet obstacle qui est notre désir de tout maitriser: voilà comment nous pouvons contribuer à l’œuvre de Dieu.
On peut ressusciter Notre Dame de Paris à coups de milliards- et c’est beau ! Mais rendre la vie à quelqu’un… et à plus forte raison se rendre la vie à soi-même ! Impossible,
même avec les meilleurs méthodes de développement personnel.
Alors que le Dieu de la vie, notre Père, nous offre de renaitre avec lui, dans son amour.
Sa puissance de viepeut nous donner la force de porter des fardeaux qui dépassent nos forces.
Nous « ne nous confions pas en nous-mêmes », dit Paul.
Aux versets 10 et 11, Paul ajoute quelque chose qu’il nous faut méditer avant de conclure : « Il s’agit de le connaître, lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion à ses souffrances, de devenir semblable à lui dans sa mort, afin de parvenir, s’il est possible, à la résurrection d’entre les morts ».
Que signifie : « Communier aux souffrances de Christ » ? C’est accepter de suivre le Christ même si cela nous met en situation délicate. Jésus a bien prévenu ses disciples que le suivre était une aventure pleine de risques !!
C’est montrer notre confiance en lui, notre amour pour lui à travers des actes concrets qui nous engagent, au risque d’y laisser des plumes. Parce qu’aimer, ca peut être dangereux ! Faire le bien quoi qu’il en coûte. Résister au mal même s’il nous fait peur et cherche à nous impressionner. Aimer au risque d’être blessés, rejetés, maltraités… Aller contre le courant du monde en élevant les autres, au lieu de nous élever nous-mêmes à leurs dépens…pas si facile.
Voilà pourquoi Paul dit « s’il est possible » : ce n’est pas l’expression d’un doute, mais il souligne la difficulté de ce chemin de foi et d’amour. Oui, sans la puissance de résurrection de Christ, impossible de le suivre !
S’engager au risque de sa vie par amour pour quelqu’un : c’est bien ce que Jésus a fait, en donnant sa vie pour nous.
C’est précisément dans cet engagement-là, notre engagement à aimer au quotidien, qu’il veut déployer pour nous la puissance de sa résurrection. Fissurer doucement la coquille de la peur de lendemain, de l’angoisse du « qu’est-ce qui va se passer ensuite ? », de la peur du rejet et de la souffrance... Soulever les lourdes pierres qui maintiennent notre courage, notre joie, notre optimisme dans un tombeau, et ouvrir nos cœurs à une espérance nouvelle : Oui, la puissance de vie de Dieu est plus forte que tout, et il ne nous abandonnera pas.
Voilà pourquoi nous pouvons nous réjouir (v.1) en tout temps : le tombeau de Jésus a été ouvert, il est revenu à la vie et il règne maintenant sur toutes choses. Nous sommes encore dans l’obscurité, mais sa lumière pointe, et bientôt, il reviendra.
A lui soit la gloire, au siècle des siècles ! Amen !
[1]Prédication inspirée par un article d’A. Kuen dans la revue Promesses, n° 169, Juillet-septembre 2009
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