Prédication du dimanche 3 juin 2018 1 Rois 12.25-33 : le cas de Jéroboam, un avertissement pour nous (S. Guiton)
Connaissez vous Jéroboam ?
Je vois d’ici quelques sourires ravis rien qu’à l’évocation de ces grandes bouteilles…
Mais si Jéroboam avait une grande capacité, c’était davantage celle de nuire que celle d’égayer la fête (même si en tant que roi, il devait avoir beaucoup de contenance - excusez moi ce jeu de mot douteux !).
Jéroboam est l’un des rois dont l’AT nous rapporte le récit, et je voudrais méditer son histoire avec vous, et même refaire son procès. Car cet homme a été déclaré coupable par les auteurs bibliques, et il est devenu célèbre pour la gravité de sa faute.
Ainsi le livre des Rois, qui raconte l’histoire de tous les souverains après Salomon, redit régulièrement, à propos de tel ou tel roi infidèle : « Il fit ce qui est mal aux yeux du SEIGNEUR ; il marcha dans le chemin de Jéroboam et imita le péché qu’il avait fait commettre à Israël ».
Qu’a donc fait Jéroboam ? Commençons le procès par l’exposé des faits.
Jéroboam a vécu au Xe siècle avant JC, au temps du roi Salomon. Sa carrière avait bien commencé : il fut repéré par le roi Salomon qui vit en lui un jeune homme « vaillant et capable » (1 Rois 11.28), et lui confia de hautes responsabilités.
Au même moment, Dieu lui révéla qu’il allait bientôt enlever le royaume à Salomon, qui se mettait à adorer des idoles païennes, pour donner à Jéroboam la royauté sur 10 des 12 tribus d’Israël. Cela, à condition qu’il écoute l’Eternel, qu’il suive le chemin qu’il lui indiquerait, qu’il agisse loyalement envers lui, qu’il obéisse à ses lois et ses commandements (1 Rois 11.38-39).
A la mort de Salomon, Jéroboam contesta la légitimité du successeur, Roboam, et fit sécession en emportant avec lui les 10 tribus du nord, ces 10 tribus que Salomon avait durement exploitées au point de les pousser à la révolte.
Ainsi la prophétie s’accomplissait, selon le plan de Dieu.
Mais c’était au prix d’un déchirement : le royaume d’Israël se trouvait désormais divisée en deux parties, ayant chacune son roi.
Jérusalem était en Juda, avec le Temple où chaque juif devait aller adorer Dieu.
Jéroboam, lui, siégeait dans le nord, à Sichem où il se fit construire une résidence. Et c’est là qu’il passa du côté obscur…
Lisons le rapport biblique des faits : 1 Rois 12.25-33
25 Jéroboam bâtit Sichem dans la région montagneuse d'Ephraïm et il y habita ; puis il en sortit et bâtit Penouel.
26 Jéroboam se dit : Maintenant le royaume pourrait bien revenir à la maison de David, 27 si ce peuple monte à Jérusalem pour faire des sacrifices dans la maison du SEIGNEUR. Le cœur de ce peuple reviendra à son seigneur, à Roboam, roi de Juda ; ils me tueront et reviendront à Roboam, roi de Juda. 28 Après avoir pris conseil, le roi fit deux taurillons d'or et dit au peuple : Vous êtes assez montés à Jérusalem ! Voici tes dieux, Israël, ceux qui t'ont fait monter d'Egypte ! 29 Il en plaça un à Beth-El et il mit l'autre à Dan. 30 Ce fut là un péché. Le peuple alla devant l'un d'eux jusqu'à Dan. 31 Jéroboam fit une maison de haut lieu et nomma prêtre n'importe qui, même ceux qui n'étaient pas des fils de Lévi.
32 Jéroboam fit une fête le quinzième jour du huitième mois, comme la fête qu'on célébrait en Juda, et il monta à l'autel. C'est ainsi qu'il agit à Beth-El, en sacrifiant aux taurillons qu'il avait faits. Il installa à Beth-El les prêtres des hauts lieux qu'il avait faits.
33 Il monta à l'autel qu'il avait fait à Beth-El, le quinzième jour du huitième mois, mois qu'il avait choisi de sa propre initiative. Il fit une fête pour les Israélites et monta à l'autel pour offrir de l'encens.
Un tel récit donne naturellement la parole à l’accusation : mesdames et messieurs, Jéroboam a commis ici plusieurs péchés graves.
Loin d’écouter Dieu comme celui-ci lui avait demandé, loin de prendre au sérieux l’attachement de l’Eternel pour Jérusalem et sa condamnation de l’idolâtrie, Jéroboam est à peine arrivé sur le trône qu’il remplace déjà le Dieu d’Israël par des statues de jeunes taureaux !
Il remplace le culte de l’Eternel par une pâle imitation qui ne garde que des ingrédients formels - des lieux saints, des sacrifices, des prêtres… - mais rejette l’essentiel : la foi dans le Dieu vivant, qui se manifeste par le respect des commandements qu’il a institués.
Jéroboam piétine même plusieurs de ces commandements, en nommant prêtre n’importe qui - alors que ce rôle était réservé, par ordre divin, à la famille de Lévi, et en offrant lui-même les sacrifices, ce qui était interdit au roi. Mais Jéroboam veut mettre pouvoir politique et pouvoir religieux de son côté, selon une recette est vieille comme le monde ; la même instrumentalisation de la religion met encore aujourd’hui le monde à feu et à sang - en Irak, en Syrie, en Israël, aux Etats Unis peut-être ? …et au delà.
Le grand péché de Jéroboam, c’est de se détourner de Dieu pour se tourner vers des idoles, en entraînant tout le peuple avec lui. Alors que la Parole de Dieu dénonce l’idolâtrie comme étant un des plus grands péchés - « tu n’auras pas d’autres dieux devant ma face, tu ne te feras pas d’idoles » est le premier des 10 commandements.
Pourquoi ? Le problème n’est pas tant dans la fabrication de statues que dans l’attitude de coeur que cela exprime : une idole est une personne ou une chose qui dans notre coeur prend la place de Dieu. Or nous avons été créés pour rendre gloire à Dieu et vivre en communion avec lui. Alors le remplacer par autre chose, chercher la vie et la sécurité ailleurs qu’en lui… c’est non seulement le mépriser mais aussi choisir la mort.
Choisir un chemin de perdition.
Voilà pourquoi l’idolâtrie est si grave, et pourquoi Jésus à son tour dénoncera les idoles de son temps, notamment celle de l’argent. Une idole dont la carrière n’a jamais été aussi florissante qu’aujourd’hui.
Pourtant choisi et aimé par Dieu, Jéroboam méprise cet amour, se détourne de lui et va chercher la sécurité ailleurs qu’en Dieu, entraînant les autres avec lui. Voilà son péché.
Dans son procès, la défense répondra ici que l’on peut quand même lui trouver des circonstances atténuantes. En effet, s’il a dérivé, n’est-ce pas en grande partie parce qu’il était en proie à une profonde insécurité intérieure ?
C’est la peur qui l’a poussé à créer ce culte alternatif : « si ce peuple monte à Jérusalem pour faire des sacrifices dans la maison du SEIGNEUR », a t’il pensé, « le cœur de ce peuple reviendra à son seigneur, à Roboam, roi de Juda ; ils me tueront et reviendront à Roboam ».
Peur de perdre le pouvoir, de ne plus être aimé, peur de mourir, au final.
Et si Jéroboam a été ainsi insécurisé, c’est parce qu’il ne se sentait pas totalement légitime sur le trône - même si Dieu lui-même l’avait placé là, pour une grande partie du peuple, il n’était qu'un usurpateur.
Se sentant menacé, il s’est replié sur lui-même et a perdu confiance en Dieu, qu’il s’est mis à percevoir comme une menace. Il a cherché à se rassurer en renforçant son pouvoir, par tous les moyens. Voilà comment cet homme a peu à peu dérivé, malgré lui.
C’est vrai, répondra l’accusation, mais cela ne lui ôte en rien sa responsabilité. Dieu n’a jamais cessé de l’avertir, et pourtant il a persisté dans ses erreurs.
Triste histoire, direz-vous. Je suis conscient que le cas Jéroboam n’est ni très positif, ni très motivant au premier abord… voilà, Jéroboam a péché, et sa famille entière en a subi les conséquences pendant des générations. Allez, bon dimanche et bonne semaine !
Mais si son cas nous est rapporté, c’est d’abord pour nous avertir et nous aider à faire le chemin… dans l’autre sens : toujours plus près de Dieu.
En effet, dans notre chemin avec Dieu, nous sommes soumis aux mêmes tentations que lui, à notre niveau. Et ce récit nous donne plusieurs avertissements précieux, à nous qui voulons marcher sur le chemin de la vie éternelle avec le Christ.
Le premier avertissement, c’est de ne pas nous laisser entraîner loin de Dieu par nos peurs et nos blessures secrètes. Peut-être nous sentons-nous insécurisés nous aussi, ou stressés… bousculés par la vie, par des relations familiales difficiles…fragilisés par la maladie….
En soi, ce n’est pas un péché. Jésus lui aussi a connu l’angoisse et la pression, Dieu sait mieux que quiconque ce que nous vivons, et croyons-le, son coeur de père en est profondément touché.
Il sait combien nos faiblesses, nos blessures nous poussent à chercher la paix et la sécurité, et son plan pour nous est justement de nous amener toujours plus près de son coeur de Père, pour que nous y trouvions, dans son amour, la guérison et l’apaisement.
C’est que Dieu attendait de Jéroboam : qu’il soit simplement honnête et vrai, qu’il reconnaisse humblement la fragilité de sa nouvelle position, et se tourne vers Dieu pour trouver en lui son refuge, pour recevoir de lui l’apaisement et l’indication de la voie à suivre.
« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos pour vos âmes », dit Jésus.
Mais comme Jéroboam, nous pouvons aussi entendre, dans nos temps de trouble, la voix de Satan qui tente de saper notre confiance en Dieu et nous incite à aller chercher la paix et la sécurité ailleurs qu’en Jésus. Souvent dans des choses apaisantes au premier abord, mais destructrices sur le long terme : je pense … non, pas au chocolat ! Mais à l’alcool bien sûr, grosse tentation dans les moments de stress. Un de mes proches est ainsi devenu alcoolique en commençant par un petit verre dans les moments d’angoisse.
La pornographie est aussi un piège de choix, et combien s’y font prendre !
Il y a des critères pour discerner si nous ne sommes pas en train de nous tromper de chemin : d’abord, que dit la Parole de Dieu sur ce que nous sommes en train de faire ? Jéroboam le savait, mais ne l’a pas écouté. Et nous ?
Ensuite, une des caractéristiques de l’approche de l’adversaire c’est le secret. Littéralement, ce qui est occulte. Pouvons-nous dire sans honte ce que nous faisons ? Sommes-nous enclins à nous cacher pour le faire ? C’est un signe d’alerte.
Ce critère est particulièrement pertinent en ce qui concerne les médecines dites « parallèles ». Quand on est « fatigués et chargés », on peut avoir envie d’aller chercher de l’aide auprès de thérapies plus ou moins connues ; certaines sont intéressantes, d’autres, manifestement occultes, sous des influences spirituelles néfastes. Un prêtre du diocèse de Lyon pointait ainsi récemment le reiki comme pratique sous influence démoniaque… il se basait pour dire cela sur son expérience dans l’accompagnement.
Ainsi, il est possible que tel thérapeute qu’un collègue nous a conseillé - « tu vas voir, il est super, ça va te faire du bien » soit en effet honnête et bienfaisant… mais la vigilance est de rigueur. Car l’expérience montre que sous les énergies soi-disant positives comme sous les taureaux d’or de Jéroboam, des réalités démoniaques peuvent se cacher.
Paul écrit que le culte rendu aux idoles est en réalité rendu à des démons. Faux cultes, fausses médecines… mais vrais pièges. Alors prenons le temps d’examiner ce qui nous est proposé : d’où le thérapeute tient-il son don ? Où veut-il nous emmener ? Cela est-il compatible avec notre foi ?
Plus largement, bien des choses, même bonnes en elles-mêmes, peuvent prendre la place de Dieu dans notre vie ; notre religion peut même se muer en pâle imitation, comme celle de Jéroboam. Car l’adversaire utilise avec nous la technique de la cuisson de grenouille.
Vous savez comment on fait cuire une grenouille ? On la met dans une casserole d’eau froide, et on fait chauffer doucement. La grenouille ne se rend compte de rien… jusqu’à ce qu’il soit trop tard.
L’adversaire utilise la même technique avec nous. Et c’est comme cela que Jéroboam s’est perdu.
Alors soyons vigilants. « Veillez sur vous-mêmes », dit la Bible (Actes 20.28). Et notamment, ne minimisons pas la gravité de nos « petits » compromis, de nos « petits » péchés, au risque de nous habituer à l’eau qui chauffe. D’autant que même tenus secrets, nos péchés peuvent avoir un réel impact sur nos proches, et même sur nos descendants. Ainsi les fissures que Jéroboam a laissé grandir dans les fondations de sa foi ont fini par entraîner l’écroulement de tout l’édifice, et cela pour des générations.
Pour finir, je dirai ceci : la prise de conscience de l’existence de piège et de la nécessité d’être vigilants ne doit pas nous décourager ni nous inquiéter, bien au contraire.
Soyons surtout encouragés à ne pas faire comme Jéroboam : pris dans le filet de l’inquiétude, Jéroboam s’est débattu au lieu d’appeler Dieu à l’aide, alors que celui-ci avait promis d’être avec lui. Et il s’est emmêlé, emmêlé toujours davantage.
« C’est Dieu qui te délivre du filet de l’oiseleur », dit la Bible (Psaume 91.3).
Contrairement à ce roi du passé, n’ayons aucune tolérance avec nos péchés, ne nous laissons pas emprisonner dans une logique de dissimulation et de secret, mais osons porter humblement nos péchés sous la lumière de Dieu, pour que le Seigneur nous en débarrasse. Il n’attend que cela ! Quelles que soient nos luttes secrètes, quelles que soient nos secrets honteux, ses bras seront toujours ouverts pour nous.
En Jésus, Dieu nous accueillera, comme le père de la parabole accueille son fils repentant, pour le revêtir d’un manteau de fête !
En Jésus, Dieu nous pardonnera et nous débarrassera des poids qui pèsent sur nous et nous entraînent vers le fond.
En Jésus, Dieu nous rendra libres.
En Jésus, Dieu a brisé le pouvoir de la mort, de Satan, du péché, et et jamais il ne nous abandonnera !
Amen
Questions
Luttez-vous avec des pensées négatives, avec l’inquiétude, avec un péché, une addiction ? Avez-vous touché à quelque chose qui impacte négativement votre vie ? Dieu vous invite à lui en parler, et à briser le silence en partageant cela à un frère ou une soeur en qui vous avez confiance. Il veut vous combler de sa grâce et vous rendre libre !
« Aujourd'hui, si vous entendez la voix de Dieu, ne fermez pas votre cœur ! » (Hébreux 4.7)
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